Un pape passe

Il est passé, a fait plus qu’un petit tour, et puis s’en est allé. Il était plus qu’attendu, au sens le plus négatif de cette expression, et l’on peut redire de lui ce qu’on a dit de Jésus : « et lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin » (Lc 4,30). On aura facilement compris que je voulais parler de la visite du pape Benoît XVI en Terre Sainte, dont on n’a pas fini d’analyser les tenants et aboutissants.

Il me faut faire une confession : je n’ai pas assisté aux messes célébrées à Jérusalem, Bethléhem ou Nazareth, mais simplement à la conférence interreligieuse de Jérusalem. Laquelle, disons-le, fut un peu décevante : pas trop bien organisée, bousculée par l’intervention inattendue d’un délégué musulman, et marquée par un discours papal bref, lu rapidement et d’une voix un peu monocorde. L’explication paraîtra à certains trop courte, mais comment ne pas l’envisager pour un homme de 82 ans : Benoît XVI était fatigué. Beaucoup autour de moi l’ont en revanche retrouvé en bien meilleure forme au cours des trois messes que je viens d’évoquer, particulièrement à Bethléhem, et me l’ont rapporté avec beaucoup d’émotion.

En vérité, que constater, que dire ? La visite avait lieu dans une ambiance tendue, au moins en Israël, mais sans doute beaucoup moins en Jordanie, voire dans les Territoires occupés : ceci peut expliquer la fatigue. Mais surtout, lorsqu’on veut bien oublier un instant ce que le pape aurait pu ou dû faire ou dire, lorsqu’on veut bien un moment cesser de le comparer à son prédécesseur et s’en tenir à son charisme personnel, lorsqu’on veut bien en définitive s’en tenir à ce qu’il a dit ou fait avec son talent personnel, qui est immense au niveau de la parole, dès lors qu’il s’agit de rappeler à ses interlocuteurs ce à quoi ils sont appelés au plus profond d’eux-mêmes, ou ce à quoi les appelle telle situation difficile qu’ils connaissent, autrement dit dès lors qu’il s’agit de discerner, alors force est de reconnaître que cette visite de Benoît XVI fut une réussite incomparable.

Non, Benoît XVI n’a pas le talent médiatique de son prédécesseur, oui c’est un homme humble et timide, pas toujours très à l’aise. Mais il a un atout majeur : il sait où est la vérité, mieux encore il sait la communiquer. Par des mots simples et directs beaucoup plus que par des gestes. Les paroles passent, les écrits restent : on aura toujours intérêt à relire les propos du pape. Ici, au Moyen-Orient où l’on s’y connaît en termes de passage caravanier, on rappelle ce fameux proverbe : « les chiens aboient, la caravane passe » ; aujourd’hui, on peut sans doute dire : « les chiens aboient, le pape passe ».

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