Le vide peut-il remplacer le plein ?

DjihadFace à la « menace jihadiste » sur notre territoire français, qui se renforce des avertissements bienvenus de nos frères d’Orient, le gouvernement imagine et propose des mesures de « déradicalisation » : un mot que l’on peine à écrire, mais surtout une réalité que l’on à du mal à définir et, du coup, à mettre en place. Pour une raison qu’il n’est certes pas bon de dire et qui me semble pourtant essentielle : le vide spirituel abyssal de notre société de consommation, en France et sans doute ailleurs.

Bien sûr, ceux qui attaquent cette société de manière violente, en France ou ailleurs, ne sont pas seulement guidés par des motifs religieux, et il importe donc de trouver des réponses fortes à leurs exactions. Mais il reste que beaucoup d’entre eux, et en particulier ceux qui les rejoignent dans leurs folies, sont, qu’on le veuille ou non, guidés par des motifs spirituels, fussent-ils dévoyés : les récits de dérives djihadistes le montrent à l’envi. Les jeunes d’aujourd’hui, comme ceux d’hier, et partout dans le monde, même si cela se présente sous des formes différentes, aspirent à donner un sens à leur vie, et ce de manière effectivement radicale : si, comme le faisait très justement remarquer (une fois de plus !) le pape François dans son discours pour la réception du prix Charlemagne (1), il ne leur est proposé que le chômage et une société de consommation effrénée et sans but, alors nombre d’entre eux basculeront vers les paradis artificiels, qu’ils soient ceux de la drogue ou des 72 vierges !

Comment en effet imagine-t-on pouvoir remplacer ce « plein » que tant de jeunes désirent ou même pensent vivre, y compris hélas ! dans les dérives les plus violentes, par une proposition aussi vide de sens que celle offerte au plan spirituel par notre société occidentale ? Surtout si, contre toute attente, on cantonne cette expression spirituelle au seul plan privé, en réduisant de toutes parts son expression. On dit chez nous qu’un clou chasse l’autre : mais alors comment donc un vide peut-il remplacer un plein ? Il n’est que temps de prendre le problème à sa racine (même famille que « radical ») et de se rendre compte qu’en fuyant la dimension spirituelle, notre société française ne trouvera jamais les bons moyens d’une déradicalisation !

(1) « Comment pouvons-nous faire participer nos jeunes à cette construction lorsque nous les privons de travail ; de travaux dignes qui leur permettent de se développer grâce à leurs mains, grâce à leur intelligence et à leur énergie ? Comment voulons-nous leur reconnaître la valeur de protagonistes, lorsque les taux de chômage et de sous-emploi de millions de jeunes européens sont en augmentation ? Comment éviter de perdre nos jeunes, qui finissent par aller ailleurs à la recherche d’idéaux et de sens (c’est moi qui souligne) d’appartenance parce qu’ici, sur leur terre, nous ne savons pas leur offrir des opportunités et des valeurs ? ». Version PDF de ce discours ICI.

P. S. Je suis très loin d’être fan des manifestations « Nuit Debout », mais au risque de pratiquer une récupération déjà opérée par d’autres sous d’autres angles, je me demande finalement, un peu comme le faisait en d’autres temps Maurice Clavel à propos des manifestations marquant Mai 1968, si ces « happenings » ne sont pas l’écho désespéré des « appels de sens » de l’Esprit.

2 commentaires à propos de “Le vide peut-il remplacer le plein ?”

  1. benito thérèse
    22 mai 2016 at 16 h 05 min Répondre

    Oui, comme vous, je pense que si certains jeunes sont tentés de fuir en Syrie et si certains passent à l’acte, c’est avant tout parce qu’ils n’ont pas trouvé de sens à leur vie.
    Mais, être d’accord ne suffit pas. La question est : comment faire pour leur faire découvrir que, tout près d’eux, dans leur propre tradition, se trouve une ouverture vers la transcendance; ou, pour le dire dans un langage chrétien, que tout près d’eux se trouve une source telle que celui qui s’en approche n’aura plus jamais soif »+.
    Merci pour cette réflexion que vous voulez bien nous partager.

  2. Merci pour cette réflexion lucide.
    Notre grande communauté européenne, imaginée qui depuis sa création par des humanistes chrétiens visionnaires comme Schuman, Monet, Adenauer, de Gaulle, a perdu progressivement sa culture et ses racines chrétiennes à cause d’hommes de pouvoir, déconstructivistes et relativistes qui veulent s’approprier la lumière et briller (définition de Lucifer) au lieu de recevoir la lumière de nos pères pour pour la transmettre et éclairer les générations futures .
    Notre civilisation est comme un bouquet de fleurs, le plus beau du monde, mais dont chaque fleur a été coupée et placée dans un grand vase rempli d’eau .
    Il est donc urgent de récupérer les fleurs qui résistent encore dans le vase, de couper le bas des tiges qui se sont « ramolies », de les tremper ensuite dans de « l’hormone de croissance », de rechercher autour de nous des « terreaux fertiles » pour les replanter et « les démultiplier » pour permettre le « progrès intégral de l’homme » des générations futures.

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