Le témoignage de la parole

Prédication sur le témoignage, donnée le jour de Pâques dans les églises de St Côme et Calvisson (Gard)

Frères et sœurs, nous nous y étions préparés, la bonne nouvelle a retenti à nouveau cette nuit : Jésus est ressuscité ! L’heure est à la joie, mais aussi au témoignage : nous sommes invités, à l’exemple de Pierre dans la première lecture, à faire connaître la nouvelle autour de nous. Mais au fait, de quoi exactement allons-nous témoigner ? Qu’avons-nous vu ou entendu ?

Témoignage du tombeau vide

La Résurrection elle-même fut à peine un éclair, produit dans l’ombre d’un tombeau, et auquel personne n’a assisté. Si bien que, paradoxalement, le premier témoignage donné aux disciples est celui d’une absence. Comme le dira l’ange à l’entrée du tombeau : « il n’est plus ici ». L’évangéliste Jean nous dit certes du disciple que Jésus aimait « qu’il vit et qu’il crut », mais en fait, ni lui, ni Pierre, ni Marie de Magdala arrivée avant eux, n’ont vu autre chose qu’une absence, qu’un manque : le corps n’était plus là ! Voilà la première caractéristique de la résurrection.

Et c’est important pour nous, parce que nous sommes, à quelques exceptions près, dans la même situation que les premiers disciples : nous n’avons rien vu, nous ne voyons rien. Ce qui est, avouons-le, un peu frustrant : ce serait si agréable, si convaincant, de pouvoir montrer à ceux qui nous entourent et qui doutent un film de l’événement et de ses suites ! Imaginez, « Jésus, le retour ! » Oh ! certes, Jésus dira à Thomas : « Heureux qui croient sans avoir vu », mais bon, un petit aperçu, cela aurait fait du bien : l’existence du suaire de Turin le montre à l’évidence, on cherche toujours à voir !

Sur quoi, sur qui se rabattre alors comme témoignage de la résurrection ? Vous pensez peut-être aux apparitions, nombreuses, à Marie de Magdala, aux disciples d’Emmaüs, aux apôtres réunis, et même, beaucoup plus tard, à Paul de Tarse. Ce sont les exceptions dont je parlais tout à l’heure, mais elles ne bénéficient qu’à quelques-uns, dont les dires seront toujours discutés : voyez toujours, si je peux dire, le suaire de Turin. Non, les apparitions ne fondent pas la résurrection, c’est la résurrection qui fonde dans la foi les apparitions.

Il faut nous tourner vers l’évangile de ce jour qui nous propose un autre témoignage sur lequel fonder la résurrection, à savoir l’Écriture sainte, la parole de Dieu : « Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas compris que, selon l’Écriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts ». Voilà donc le témoin par excellence. On peut croire sans avoir vu, on ne peut croire sans avoir entendu ! Exactement comme saint Paul le dit dans la lettre aux Romains : « Comment croiraient-ils en lui, sans l’avoir entendu ? »

La parole peut certes paraître fragile, mais en réalité, et quoi qu’en pense ou qu’en dise notre monde aujourd’hui, elle l’est moins que les apparitions, que tout ce qui est de l’ordre de la vue : il n’est qu’à constater ce que rapportent les témoins d’un accident… Oui, la parole oblige à la confiance, elle crée une solidarité entre celui qui parle et celui qui écoute. Et dans le mot de solidarité, il y a l’adjectif « solide ». Souvenez-vous : « si vous gardez ma parole, vous ne verrez jamais la mort ». Il ne s’agit pas de garder le souvenir des traits de Jésus, savoir s’il était blond ou brun, grand ou petit, mais de garder sa parole : ensuite, c’est elle qui nous garde ! Solidement !

Lorsqu’on a compris, comme les disciples venus au tombeau, que la parole est au fondement de notre foi en la résurrection, alors on comprend aussi pourquoi nous ne pouvons être des témoins muets, pourquoi il nous faut devenir à notre tour apôtres, autrement dit envoyés pour dire la résurrection, en se fondant sur la parole de Dieu. Cette parole est faite pour être transmise ! Que dit Jésus aux apôtres après sa résurrection ? Il les envoie : « allez, et de toutes les nations faîtes mes disciples » (Mt 28,20). En leur donnant ma parole.

Une réponse à “Le témoignage de la parole”

  1. Les disciples n’ont pas voulu (pu) comprendre la Parole parce qu’ils projetaient sans doute leur idée de maîtrise par rapport à Jésus et que nul ne peut voir, sans frémir, le roi dans sa nudité cadavérique. Ce n’est pas pensable. Il a fallu cependant courir (rivalité entre Pierre et Jean pour être le meilleur!) au tombeau pour être saisi par le mystère du Dieu fait homme et ressuscité ! Puissions-nous courir vers nos tombeaux humains pour affirmer et partager la Joie d’un visage qui se sait aimé !

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