Les contestations se multiplient

Dans un contexte politique et sanitaire très délicat, où les contestations semblent devenues la règle, il me semble nécessaire de faire crédit aux instances politiques, sanitaires, religieuses, de leur action sans leur jeter a priori la pierre : le paysage est très mouvant, l’angoisse des uns et des autres patente, toute orientation ou décision ne manquera pas d’être passée au crible et critiquée, souvent avec une violence que je trouve mauvaise conseillère.

Contestations
Contestations

Ces critiques fusent au sein même de chaque instance, provoquant au mieux des contestations, au pire des divisions internes douloureuses : je pense aux partis politiques, mais aussi bien sûr à une instance que je connais mieux, l’Eglise catholique de France. Les anathèmes volent très bas, en particulier sur les réseaux sociaux que je fréquente quelque peu. On est loin de la prudente et rationnelle disputatio à laquelle j’ai déjà fait référence sur ce blog.

Loin de moi donc l’idée de cataloguer et discréditer tel ou tel, mais un peu de réflexion distanciée ne nuit pas. Par exemple sur la question des manifestations pour la réouverture au culte des églises. Je regrette que certains aient cru pouvoir jeter la pierre aux évêques ou aux personnes ayant eu recours au Conseil d’Etat, alors que c’est là leur droit, et le droit le plus strict compte tenu des règles qui régissent en France les rapports Eglise/Etat. Inversement, je regrette tout autant les manifestations publiques intempestives qui ont présenté la célébration dominicale ou quotidienne (je ne dis pas « la messe ») comme un droit imprescriptible, alors que dans les camps de réfugiés, dans de très nombreux pays, dans d’immenses espaces négligés comme la fameuse Amazonie, ces célébrations sont rares ou inexistantes. Il y avait là matière à vivre un jeûne de communion, aussi paradoxale que l’expression puisse paraître.

Maintenant, il ne faut pas noyer le poisson. Je sais que plusieurs s’étonnent, et sont souvent blessés de la position victimaire qu’aurait adoptée l’Eglise catholique, ou au moins plusieurs de ses membres, mais je ne partage pas vraiment ce point de vue. Sans aucunement évoquer une volonté de nuire ou pire de persécution, il ne me semble pas exagéré de dire que notre Eglise de France fait, depuis pas mal de temps, l’expérience qu’ont déjà faite ou que font encore de très nombreux « corps sociaux » : celle de contestations diverses et variées venues des instances gouvernementales.

Je pense aux gilets jaunes, aux écologistes, au monde de la culture, et combien d’autres : nos gouvernements successifs leur promettent dans un premier abord bienveillance, consultation, attention particulière, prise en compte de leurs demandes (comment ne pas évoquer ici le discours aux Bernardins du président de la République ?), avant que les intéressés ne découvrent que toutes les rencontres et consultations, souvent menées à grands frais, sont purement et simplement écartées et ne trouvent donc aucune suite. Des décisions sont prises sans aucun lien avec la parole engagée, avec les promesses faites. Et plus personne au bout du fil quand il s’agit de connaître les raisons et de les justifier !

Quand j’écris « nos gouvernements successifs », je veux souligner que ces prétendues consultations ne sont pas récentes : je pense par exemple à ce qui s’est passé au moment de la Manif pour tous. Je ne cherche aucunement à cautionner ou rejeter les raisons de cette Manif, mais en me souvenant qu’une pétition signée par plus d’un million de citoyens ne trouve aucun écho et se trouve écartée par le gouvernement de l’époque, je ne peux pas m’étonner qu’amertume et rancune viennent habiter durablement les citoyens en question. Et, parmi beaucoup d’autres, il me semble que les protestataires des gilets jaunes, ou les 150 membres de la consultation écologique peuvent dire de même.

Tout récemment encore, force consultations ont été conduites pour mettre au point un protocole sanitaire adapté à chaque situation. Lorsqu’il est publié, les protagonistes sont bien obligés de mettre en cause son contenu et de faire savoir qu’il est injuste et arbitraire. Pour prendre l’exemple typique des lieux de culte : nul n’est capable d’expliquer d’où vient cette jauge de « 30 personnes », sinon par un lapsus, qui n’a pas été rectifié, pour évoquer un « taux de 30 % ». Et cerise sur le gâteau, notre premier ministre évoque des foyers de diffusion de la pandémie qui seraient nés dans les assemblées cultuelles, sans qu’aucun exemple fondé ne puisse être donné. Qui est responsable des contestations qui surgissent ?

Encore une fois, je parle ici de ce que je connais le mieux, mais je note que les milieux de la culture, de la restauration, de l’hôtellerie, du sport, disent la même chose pour les jauges les concernant, quand ils ne font pas purement et simplement face à une interdiction de rouvrir. Pourquoi alors avoir mené ces consultations préalables si le résultat était acquis par avance ?

L’arbitraire, le manquement à la parole donnée, le mensonge ne peuvent être des modes de gouvernement comme cela arrive beaucoup trop souvent : ils finissent inévitablement par se retourner contre ceux qui en usent (voir la polémique sur le recours aux masques) et, surtout, ils minent la confiance qui devrait régir le rapport gouvernants/gouvernés.

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