Un monde qui passe, un autre qui pousse

Il est aujourd’hui de notoriété publique que notre monde (occidental ?) va mal, que tout un système est en train de passer, pour ne pas dire trépasser. Je rappelle quelques-uns de ces indices : changements climatiques, migrations impossibles à maîtriser, pandémies (pas que celle du coronavirus), guerres et massacres sans fin, replis individuels et identitaires, dimension spirituelle évaporée ou maltraitée, ressources naturelles dégradées (et je pense à l’eau, dont on parle encore trop peu) etc.

Ce n’est pas tant l’existence de tel ou tel indice qui me frappe, car on pourrait le trouver à d’autres époques, mais leur conjonction. On connaît l’expression « tous les indicateurs sont au rouge », tel est le cas me semble-t-il pour notre monde, tel du moins que nous le connaissons actuellement. Et la réaction première, par peur, par incapacité de répondre, par aveuglement plus ou moins volontaire, est de se cacher la tête dans le sable.

Tant il est vrai qu’aucune réponse globale ne se dessine. J’admire les hommes politiques, tous les élus, tous ceux qui ont des responsabilités économiques qui « s’y collent », mais on a l’impression qu’ils ne disposent que de rustines ! A cet égard, la pandémie que nous sommes en train de vivre en donne un exemple flagrant : elle dit à sa manière la fragilité extrême d’un monde qui passe.

Suis-je pour autant pessimiste ? Eh ! bien non. Mais seule ma foi au Seigneur ressuscité me permet de voir les choses autrement. C’est elle qui me dit qu’aucun geste en vue du bien commun, fût-il le plus banal, n’est inutile : « tous les cheveux de votre tête sont comptés » (Lc 12,7) et « ce que vous avez fait au plus petit de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25,40).

C’est ma foi encore qui me dit qu’il existe un autre monde en gestation, que la disparition d’un monde n’est pas la disparition du monde, à moins que le Seigneur n’en ait décidé autrement. Mais il ne nous appartient pas de « connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité » (Ac 1,7). Dès lors, je suis appelé, nous sommes appelés au discernement : un monde disparaît, il est inutile de regarder en arrière au risque de devenir statue de sel (Gn 19,26). Il me faut, il nous faut sans cesse tâcher de reconnaître et de favoriser les pousses modestes, fragiles, d’un monde nouveau.

Elles ne sont pas facilement repérables, il y faut du temps, l’ivraie se confond souvent avec le bon grain (Mt 13,24-30),. La prière, cette prière fervente à laquelle nous sommes spécialement invités pendant le Carême, est certainement le meilleur des outils de discernement. C’est elle qui nous ouvre au monde naissant.

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