La première lecture de la liturgie de ce jeudi 13 juillet (Gn 44,18-34 et Gn 45,1-5) nous rapporte l’heureux dénouement de l’épreuve vécue par Joseph : vendu par ses frères, tenu pour mort par son père Jacob, il a connu une bonne fortune en Égypte où il est devenu une sorte de vizir. Cette position va lui permettre de venir en aide à sa famille souffrant de la famine…
Après avoir entendu cette histoire, les connaisseurs du Nouveau Testament rappelleront que, selon saint Paul dans la lettre aux Romains, « Dieu fait tout concourir au bien de ceux qui l’aiment » (Rm 8,26), un peu comme d’autres diraient : « après la pluie, le beau temps » ou encore « tout est bien qui finit bien ». Mais s’agit-il seulement de cela, autrement dit d’affirmer que la joie succède inévitablement, à un moment ou à un autre, à l’épreuve ? Ce serait, me semble-t-il, diminuer le bénéfice de la croix du Christ.
Pour le comprendre, je propose à mes lecteurs d’écouter le magnifique témoignage de Benoît et Marie-Axelle Clermont, interrogés par un journaliste d’Aleteia sur leur immense épreuve, la maladie et la mort de leur fils Gaspard à 41 mois : une histoire largement connue grâce à la page Facebook Gaspard entre terre et ciel, dont il a été plusieurs fois question déjà sur ce blog (faire une recherche sur « Gaspard »). Que nous disent nos amis ? Que leur souffrance est immense (« on ramasse » dit Benoît à deux reprises, qu’il faut sans doute entendre « on est à la ramasse »), qu’elle reste leur lot et qu’ils ne souhaitent à personne de vivre une telle épreuve, mais… que la joie, une joie paradoxale, fruit inattendu de leur foi, se rencontre au cœur de leur épreuve. Non pas avant ou après, mais au cœur. Et cela sans aucun masochisme ou dolorisme, mais tout simplement, si l’on peut dire, parce que pour nos amis, Jésus habite l’épreuve avec ceux qui la subissent : c’est là l’un des grands bénéfices de la Croix du Christ.
Du coup, l’affirmation de l’apôtre Paul citée plus haut prend une tout autre ampleur. Non pas que nous soyons invités à courir après l’épreuve, là serait le dolorisme ou le masochisme, mais à reconnaître au cœur de cette épreuve une présence divine et donc un soutien. Rien d’évident, bien sûr, et gardons-nous bien d’asséner une telle affirmation à ceux qui souffrent, rien de gagné à la force du poignet, non, un don !
Faut-il souligner combien cela éclaire certains paradoxes de l’enseignement de Jésus, par exemple dans les Béatitudes (« Heureux êtes-vous quand on vous insultera, qu’on vous persécutera, et qu’on dira faussement contre vous toute sorte d’infamie à cause de moi. Soyez dans la joie et l’allégresse, car votre récompense sera grande dans les cieux », et peut-être pas seulement dans les cieux), ou encore cette invitation qui nous est faite à prendre notre croix et à le suivre (Mt 16,24)…