Dieu avec nous, mystère de Noël

Prédication donnée au monastère des moniales dominicaines de Chalais, dans le massif de la Chartreuse, pour le 4e dimanche de l’Avent.

Mes sœurs, chers amis, pour ne rien cacher à ceux qui seront encore avec nous la nuit et le jour de Noël, il sera question dans mes prédications successivement de la Lumière et du Fils, autrement dit des titres attribués à Jésus. Évidemment, certains d’entre eux sont déjà présents dans nos lectures d’aujourd’hui. Aussi, vais-je me limiter à deux autres titres : le nom même de Jésus et celui d’Emmanuel.

Beaucoup autour de nous ont perdu le sens des noms, ou plutôt me sens traditionnel des prénoms. Mais en choisissant par exemple des prénoms de vedettes du showbiz, ils manifestent quand même une forme de référence/révérence. Pendant longtemps dans l’Église, la révérence fut pour Dieu : Raphaël, Gabriel, Michel, contiennent tous dans leur intitulé le terme El qui renvoie à Dieu. Tel n’apparaît pas immédiatement être le cas pour le prénom Jésus, et pourtant, l’évangéliste nous le rappelle : ce prénom, avec son Iod initial, ici le Jé de Jésus renvoie à Dieu, et le prénom signifie « Dieu sauve ».

Ainsi, avant même sa naissance, Jésus se trouve investi d’une mission divine de salut. Il en fut de même pour Jean-Baptiste, dont les parents n’ont pu choisir le prénom qui signifie « Dieu fait grâce » Eux avaient pensé lui donner le prénom de son père, Zacharie, ce qui aurait eu du sens : ce prénom veut dire « Dieu se souvient ».

Mais je reviens à Jésus. Des sauveurs, l’histoire biblique en a connu de nombreux, par exemple à l’époque des Juges : chacun d’eux était appelé à sauver son peuple de l’oppression d’un voisin. Était-ce à cela que Jésus était appelé à son tour ?

C’est ici que la deuxième titulature prend tout son sens : Jésus n’est pas seulement le dernier en date des Sauveurs, mais « Dieu avec nous », Emmanuel. Une telle référence est classique dans la Bible à titre de souhait, et nous l’utilisons dans la liturgie : « Le Seigneur soit avec vous ». Mais nous ne sommes alors que des médiateurs, alors qu’avec Jésus Emmanuel, c’est le Seigneur lui-même qui est là, présent.

Cela change tout : avec « Dieu sauve », on aurait pu attendre un simple homme providentiel, avec « Emmanuel », Dieu lui-même est là en personne pour sauver. « Dieu avec nous », et il continue de l’être, fût-ce de manière différente, par son Esprit.

A bien y réfléchir, voilà bien quelque chose d’incroyable, au sens fort de ce terme. Et le doute, disons au moins l’interrogation, est manifeste dans nos lectures. Avec Acas qui s’interroge sur ce que lui demande le prophète et refuse de demander un signe. Et Joseph lui-même ne craint-il pas de prendre Marie pour épouse ?
Que Jésus soit Sauveur peut encore passer, je vous l’ai dit, il y en a eu d’autres, mais Emmanuel… Souvent, peut-être parce qu’avec l’âge je retombe en enfance, mais lorsqu’au cours de la célébration eucharistique, je reçois ou tiens Jésus dans le trône de mes mains, je me pose la question : comment se fait-il que le Sauveur du monde, l’Emmanuel, se soit fait si petit qu’il tienne dans ces mains ?

N’est-ce pas tout le mystère de Noël ?

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