Frère ou père, un éclairage dominicain

« Faut-il vous appeler frère ou père ?  » Je ne sais pas combien de fois j’ai entendu, comme d’autres frères dominicains, cette question un peu inquiète, par crainte de mal faire ou de mettre les pieds dans le plat ! La réponse est simple pourtant : frère est toujours approprié.

Il faut prendre la chose par le bon bout et revenir au baptême : là, on reçoit un prénom, qui, même si on l’oublie aujourd’hui, est censé déterminer une mission, et donc être porteur de signification. Ainsi l’avons-nous réentendu récemment à propos de Jean le Baptiste (« Dieu fait miséricorde ») et de Jésus (« Dieu sauve »).

Ce prénom reste en toute occurrence celui du frère dominicain, et il ne devrait en aucun cas le perdre : sa vocation religieuse n’est en effet rien d’autre qu’une forme de réalisation de son baptême, mais certainement pas un « nouveau baptême ». Hervé j’étais avant mon engagement dans l’Ordre des Prêcheurs, Hervé je suis resté ensuite.

Habit frère prêcheurMais il est vrai qu’à l’occasion de ce que l’on appelle une « prise d’habit », le rituel prévoit une interpellation : dans mon cas, ce fut « tu t’appelais Hervé, désormais tu t’appelleras frère Hervé ». Le prénom est resté, en toute logique baptismale, mais l’Ordre, par la voix de son représentant, en général le prieur provincial, le fait précéder de la mention « frère » : c’est donc à la fraternité que nous sommes appelés par notre engagement, et il faudra bien toute une vie pour parvenir à la réaliser. Il est bon que cela nous soit rappelé régulièrement à travers l’appellation frère !

Cette appellation convient donc à tous les frères (je ne sais rien, je l’avoue, du rituel des sœurs moniales ou autres), mais il se trouve que, parmi eux, un petit nombre choisit la vie de frère coopérateur, autrement dit non-prêtre. C’est pour opérer cette distinction, qui n’a en vérité aucune raison d’être au niveau de l’engagement religieux, que certains frères prêtres choisissent de se faire appeler « père », ou que certaines personnes estiment nécessaire de les appeler de la sorte.

Cette distinction, on l’aura compris, est totalement superflue : elle a sans doute son sens dans une communauté monastique, avec une organisation particulière qui donne toute sa place à l’abba/abbé, père, mais pas dans l’Ordre des Prêcheurs. Et il est symptomatique que plusieurs témoignages rapportent que saint Dominique n’a jamais accepté de se faire appeler autrement que frère Dominique !

2 commentaires à propos de “Frère ou père, un éclairage dominicain”

  1. A l’occasion de la « prise d’habit », le rituel a précisé que désormais vous serez appelé « frère » Hervé.
    C’est intéressant car, il me semble, qu’en franc-maçonnerie lorsqu’un profane est initié maçon, les membres de sa Loge l’appellent « frère ». Et cela est inscrit dans le « rituel ». Tiens, ils parlent aussi de rituel…
    Tout ceci illustre, une fois de plus, la filiation de la franc-maçonnerie vis-à-vis du fait religieux (en dehors de tout dogme…).

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