L’article qui suit a été publié le 1er mars sur le site Évangile et Liberté, tenu par mon ami le pasteur James Woody : il fait écho à mon livre « Noius n’avons qu’une seule vie » (Paris, Cerf, 2020).
« Maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle ? » (Mc 10,17) La question que pose un scribe à Jésus doit sonner étrangement à nombre de nos contemporains. S’il fut en effet un temps où la vie éternelle constituait une préoccupation essentielle du peuple chrétien, au point d’en oublier les exigences d’une vie terrestre, le vent a tourné : la vie éternelle est rejetée dans un au-delà très lointain, et sans intérêt pour la vie quotidienne.
Il se trouve que, au moins pour les catholiques, mais sans doute bien au-delà d’eux, dans une préface de la messe, il est dit : « dans l’existence de chaque jour que nous recevons de ta grâce, la vie éternelle est déjà commencée ». C’est donc un tout autre regard qu’il est proposée d’avoir sur la vie éternelle : elle est déjà présente dans la vie quotidienne. Laquelle reçoit de cette présence un poids qui justifie qu’on lui accorde la plus grande importance.
Qui que nous soyons, pauvres ou riches, faibles ou puissants, anges ou monstres, nous avons été créés à notre naissance à l’image et à la ressemblance de Dieu. Or plusieurs pères de l’Église l’affirment, si la ressemblance se perd par le péché, l’image reste toujours au plus profond de chaque être humain, fût-ce profondément enfouie. Si bien que nous naissons de Dieu et avons tous vocation à retourner à Dieu : toute la vie humaine est empreinte de cette espérance. D’espérance, pas d’espoir : ce dernier nous tourne vers un avenir incertain, quand l’espérance nous fait vivre aujourd’hui sur le fondement d’un acquis, celui de la résurrection de Jésus.
Notre vie quotidienne est donc déjà traversée de vie éternelle et forte de cette présence. Certes, le péché nous éloigne du jardin d’Eden, et continue de le faire, mais un autre jardin nous attend, celui de la Jérusalem céleste. Dieu nous y attend : il vient à notre rencontre, il nous donne son Fils pour ouvrir le chemin, et son Esprit pour nous accompagner sur la route.
« Allons donc de l’avant et pensons à notre Sauveur » (parole de saint Dominique à ses frères).