Jérusalem est loin, géographiquement au moins, et je n’y retourne que dans un peu plus d’un mois. Mon sentiment est celui d’une légèreté retrouvée : bien sûr, il doit y avoir le fait que les responsabilités sont moins lourdes en ce temps de vacances où l’École biblique sommeille un peu (un peu seulement, je n’oublie pas les étudiants français en pèlerinage, ni les nombreux chercheurs qui viennent profiter de la bibliothèque) ; mais j’ai quand même l’impression que, pour moi comme pour beaucoup de gens vivant habituellement en Terre Sainte, le relâchement est celui de la pression « politique », le fait de se trouver à distance d’un pays où la violence, multiforme, n’est jamais loin.
Jérusalem, pourtant, reste proche. Sans doute là aussi parce que je n’ai pas totalement quitté l’habit de directeur de l’École et ne le quitterai pas (chaque jour ou presque, dans notre monde technique, les courriels sont là qui franchissent toutes les distances) ; mais très certainement aussi parce chacun de nous porte Jérusalem en lui où qu’il aille. Qu’il soit chrétien ou non : s’il est chrétien, parce que Jérusalem est au coeur de l’Ancien Testament, au coeur des psaumes, au coeur de la Passion de Jésus ; et s’il ne l’est pas, parce que Jérusalem, ville de paix si l’on en croit son étymologie, est aussi depuis trois mille ans, le coeur, et souvent le germe, de tous les conflits de la planète.
« Si je t’oublie, Jérusalem, que ma droite se dessèche ; que ma langue s’attache à mon palais, si je perds ton souvenir », dit le psaume 137. Mais qui peut vraiment oublier Jérusalem après y être non seulement passé, mais y avoir vécu ?