Après plus d’un an d’absence, me voici de retour de Terre Sainte où je viens d’accompagner un groupe de pèlerins. Venir en Terre Sainte, c’est venir à Jérusalem, à Nazareth, sur les bords du lac de Galilée ou les hauteurs du Golan, beaucoup plus qu’à Tel Aviv. C’est peut-être injuste pour cette dernière ville, réputée accueillante et en plein essor, c’est sans doute injuste pour la région tout entière qui a d’autres questions et bien des atouts à faire valoir, mais du coup le visiteur se trouve d’emblée placé au milieu du chaudron, confronté à la lancinante question : une paix entre Palestiniens et Israéliens est-elle encore possible ?
Et, à nouveau, le constat est le même : la distance entre les communautés est plus grande que jamais, la paix semble s’être éloignée plus que rapprochée, elle n’est guère plus qu’un point minuscule perdu dans le lointain. Constat confirmé moins par l’actualité de négociations chancelantes que par des personnes de très grande qualité écoutées lors de rencontres formelles : un pessimisme profond prévalait de tous côtés, et l’on sentait que l’espérance avait déserté. Or vivre dans une famille, une communauté, un pays privés de toute espérance, pensez-y, c’est un avant-goût de l’enfer !
Dans son fameux Porche du mystère de la deuxième vertu, en 1912, Charles Péguy avait évoqué l’effet d’entraînement de la petite fée Espérance sur ses deux grandes sœurs plus connues que sont la Foi et la Charité :
« Les aveugles qui ne voient pas au contraire.
Que c’est elle au milieu qui entraîne ses grandes sœurs.
Et que sans elle elles ne seraient rien.
Que deux femmes déjà âgées.
Deux femmes d’un certain âge.
Fripées par la vie.
C’est elle, cette petite, qui entraîne tout ».
Dois-je donc terminer ce petit billet sur une note résolument sombre ? Non, dans la ligne des psaumes, où l’on trouve toujours un peu de lumière dans la nuit la plus noire, je vais évoquer une luciole d’espoir, née d’un constat matériel et qui paraîtra à beaucoup sans doute dérisoire : à l’aéroport Ben Gourion, le contrôle long et tatillon des bagages de soute de chaque voyageur est désormais abandonné. En d’autres termes, la procédure d’enregistrement et de contrôle des bagages est celle que l’on peut trouver dans la plupart des aéroports d’aujourd’hui. Dispositif allégé dont j’ai senti, aussitôt que je l’ai découvert, la répercussion heureuse sur ma propre humeur. C’est idiot, mais je me suis dit à cause de cette modeste mesure toute récente et dont m’importent peu les raisons : tiens, nous sommes enfin dans le pays de la vie normale !
Serait-il possible qu’il en soit de même un jour dans tout le pays et pour tous les acteurs concernés ?