Sur Actes 3,13-15.17-19 et Luc 24,35-48
Frères et sœurs, le dernier mot de l’évangile que nous venons d’entendre est celui de « témoins ». C’est un thème sur lequel saint Luc revient souvent, en recourant à deux termes différents : le premier, employé une seule fois, consiste à simplement rendre compte, c’est le témoignage visuel ; et le deuxième, très fréquent, qui évoque un engagement personnel allant jusqu’au don de la vie, c’est le martyre. C’est le terme employé ici, et tout au long des Actes des Apôtres, sans doute parce que c’est le service que Jésus attend de ses disciples au lendemain de la résurrection.
Frères et sœurs, avons-nous le choix entre deux appels ? Je ne le crois pas. Même si vous comme moi, braves mais pas téméraires, nous nous voyons peut-être plus facilement en simple témoin qu’en martyr, cette possibilité ne nous est plus offerte : à moins d’avoir des apparitions, le temps de la vision a disparu. Il nous faut bien être témoin au sens de martyr. Mais cela ne veut aucunement dire qu’en sortant de cette célébration, vous deviez vous précipiter à la rencontre de vos bourreaux : le martyre est en quelque sorte un accident, dans la mesure où l’on ne choisit pas d’être martyr, on le devient, c’est un aboutissement.
Quel est alors ce témoignage que Jésus attend aujourd’hui de chacun de nous, et qui soit donc à notre portée ? Il repose sur l’Écriture. Vous l’aurez sans doute constaté, aux disciples rassemblés à Jérusalem, comme à ceux d’Emmaüs un peu plus tôt, Jésus explique les Écritures, il ouvre l’esprit des disciples à leur intelligence. Ces Écritures ne sont certes pas la seule manière de faire la rencontre de Jésus, Jésus se manifeste aussi dans le sacrifice eucharistique, dans le sacrement de réconciliation, dans la rencontre des pauvres et des petits ; c’est vrai, mais il se manifeste aussi à travers elles comme le rappellent les disciples d’Emmaüs : « notre cœur n’était-il pas tout brûlant en chemin quand il nous interprétait les Écritures ? ». On rapporte de sainte Rose de Lima que, lorsqu’elle lisait les évangiles, elle voyait un petit Jésus se promener entre les lignes : je voudrais bien que nous ayons tous cette chance.
L’évangile de ce jour nous demande donc de rendre témoignage à Jésus à partir des Écritures, en évoquant pour nos interlocuteurs leur accomplissement, un thème aussi fréquent chez Luc que celui du témoignage : il est présent aujourd’hui dans la première lecture des Actes, « Dieu a ainsi accompli ce qu’il avait d’avance annoncé », comme dans l’évangile, « il faut que s’accomplisse tout ce qui a été écrit à mon sujet ». Dans les deux cas, ce qui s’accomplit, c’est la parole de Dieu : mais comment pourrons-nous témoigner d’un tel accomplissement si nous n’avons qu’une très vague connaissance des Écritures ?
J’entends déjà la réponse que l’on va me faire : rendre témoignage à l’accomplissement des Écritures, certes, mais celles-ci sont si vastes et compliquées, il nous faut de l’aide. Très franchement, avons-nous besoin d’aide pour comprendre ce que nous dit un ami ? Non pas, il faut le fréquenter assidûment, et son vocabulaire, sa manière de parler, nous deviennent familiers. Et nous le comprenons de mieux en mieux au fur et à mesure de la lecture. Il en va de même avec la Bible, commençons donc par le plus simple, les évangiles, les psaumes, quelques prophètes, sans trop nous poser de questions, disons une lectio divina adaptée… et le reste deviendra simple. Mais commençons, n’attendons pas, ne cherchons pas d’excuses.
Frères et sœurs, je voudrais vous poser une question. Je suis sûr que vous ouvrez plusieurs fois par jour votre courrier électronique ? Pour prendre des nouvelles des uns et des autres. Faîtes-vous de même avec votre bible ? Pas sûr ! Pourtant les propositions n’ont jamais été si nombreuses. Je prends au hasard : Retraite dans la ville, Signe dans la bible, Théobule… Alors je vous propose un engagement, celui d’ouvrir votre bible au moins une fois chaque jour dès lors que vous ouvrez votre courrier électronique : parce que Dieu et Jésus sont vos amis, qu’ils voudraient eux aussi de vos nouvelles et que vous sachiez ce qu’ils deviennent. Et vous verrez que vous finirez par leur rendre témoignage.