Le cardinal Barbarin est, depuis quelques jours, au centre d’une tourmente médiatique en lien avec une question plusieurs fois traitée sur ce blog, celle des victimes de dérives psychologiques ou sexuelles. Avec toute l’infinie compassion et le respect que je ne cesse de manifester à ces victimes, j’ai quand même l’impression très forte que le cardinal subit en ce moment un lynchage immérité : s’il est vrai que, dans un contexte nouveau et beaucoup mieux informé, Mgr Barbarin peut paraître aujourd’hui laxiste dans le traitement qu’il a accordé au Père Preynat, prédateur avoué (1), s’il est vrai que l’horrible ‘excuse’ de la prescription ne saurait être invoquée, il reste que ce traitement était la norme à l’époque, et ce d’autant plus que le Père en question semblait bien avoir depuis longtemps repris le bon chemin… Oui, c’est vrai, il s’agit en l’espèce d’une affaire de pédophilie, laquelle constitue une dérive grave et profonde qui exige d’établir de très prudents et solides garde-fous, mais devait-on d’emblée et définitivement refuser tout crédit à ce prêtre ?
En même temps, la médiatisation de l’affaire et la mise en cause du cardinal ne sauraient surprendre : il faut bien se rendre compte que dans le domaine des dérives sexuelles toujours, et psychologiques souvent, les victimes ne sont jamais quittes du dommage causé, fût-ce des années ou dizaines d’années après ; et, en outre, que justice doit leur être rendue en leur permettant enfin de s’exprimer, ne serait-ce que dans une visée thérapeutique. Il n’est pas surprenant non plus du coup que, lorsque la boite de Pandore de ces dérives est ouverte, elle se révèle beaucoup plus lourde qu’on ne pouvait le penser au premier abord. Pas seulement du côté des prêtres c’est vrai, mais aussi de bien d’autres membres et institutions de notre société : il reste que les prêtres, qui se doivent d’être exemplaires, ont une responsabilité plus grande.
Dans un tel contexte, très difficile, la réaction de mon Église est-elle à la mesure de ce qu’on peut espèrer d’elle ? Peut-être aurait-elle pu saisir deux occasions de se positionner au plus près des victimes dans une juste compassion :
- S’il y a bien des arguments à faire valoir en faveur du cardinal, comme j’ai commencé de le rappeler plus haut, et si je doute fort d’une culpabilité personnelle, on peut se demander si Mgr Barbarin n’aurait pas pu donner un témoignage fort en démissionnant très tôt et de son propre chef : comme cela est évoqué par plusieurs médias ou personnes individuelles, et comme d’ailleurs certains responsables d’entreprise le font lorsque leurs subordonnés sont mis en cause. Non en raison de torts certains, mais pour manifester sa solidarité avec les victimes et en prenant en quelque sorte leurs souffrances sur eux. A la manière dont Jésus le fait dans sa passion et sur la croix. Je me pose aussi la question à titre personnel, mais je ne connais pas la juste réponse. D’autant qu’un tel geste serait lourd de conséquences pour un évêque et son diocèse, qu’il ne peut donc être effectué à la légère et sans peser les responsabilités, et qu’il pourrait enfin et en outre être interprété autrement, comme l’aveu d’une culpabilité…
- Le sujet de ces dérives, nous disent les journalistes, a fait l’objet d’un sérieux débat au cours de la rencontre toute récente des évêques de France à Lourdes. L’on sait qu’ils étaient réunis à huis clos : n’était-ce pas alors l’occasion, fût-ce dans l’urgence puisque la question n’était pas à l’ordre du jour originel, de porter à la connaissance de tous nos évêques des témoignages de familles ou de personnes blessées, que l’on aurait invitées à venir témoigner ? Le temps pressait, il ne me semble donc pas, à lire les dépêches en tout cas, que cela se soit fait, et les évêques sont restés entre eux : cela aurait pourtant pu constituer un signe fort.
Nous devons tous reconnaître, une fois pour toutes, dans notre Église comme ailleurs, qu’il faut donner la priorité aux victimes, aller sans tarder à leur rencontre, les aider à parler, et leur témoigner toute la compassion nécessaire et justifiée que la plupart n’ont pas eue ou peinent à avoir (2).
(1) On peut lire certaines de ses lettres sur le site de La Parole libérée.
(2) Il faut lire le vigoureux et courageux éditorial de Mgr de Raemy, évêque auxiliaire de Lausanne, Genève, Fribourg.
Pourquoi Barbarin ? Pourquoi pas d’autres Evêques ? Alors qu’à ma connaissance , la discipline de l’Eglise n’était pas de chasser les coupables du sacerdoce d’autorité. Je ne suis pas sûr que ce soit le cas pour des cas d’attouchements ou possession de photos pedophiles actuellement.
Par ailleurs, un Evêque qui entend parler d’un éventuel coupable ancien mais qui semble innocent ou repenti et qui n’a pas été condamné par la justice doit il jeter un prêtre dehors sur une réputation ? On a connu des cas d’accusation mensongère.
Pourquoi aussi demander la miséricorde pour certains et pas pour d’autres ?
Je souhaite pour ma part la plus grande sévérité car la pedophilie même comme tendance est incompatible avec le sacerdoce et la vie religieuse. Mais il faut la sévérité pas seulement dans ce cas là, mais aussi par exemple pour les prêtres ou les religieux qui sont indélicats avec l’argent de l’Eglise ou ceux qui ont une double vie hétérosexuelle ou homosexuelle.
Je pense que BARBARIN a été aussi visé parce qu’il est cardinal, parce qu’il a manifesté courageusement contre le mariage pour tous et parce qu’il est une des rares voix épiscopales qui est audible et connue.
C’est aussi une attaque ciblée et délibérée contre l’Eglise catholique. Je suis persuadé que les victimes ont été instrumentalisées.
Merci, Jean-Michel, pour ce point de vue que je comprends très bien. Je n’ai pas tant voulu charger Mgr Barbarin, qui l’est déjà beaucoup par d’autres comme je le rappelle, que proposer quelques réflexions sur les « moyens » ou « opportunités » de venir en aide aux victimes de manière « parlante ».
Cela dit, sur le site de La Parole libérée, que j’évoque, il me semble que le ton n’est pas provocant, et que les questions sont justement posées. Comme sur l’édito de Mgr de Raemy qui me semble un modèle pastoral dans ce domaine.
Si vous avez été aux Finances de l’Église de France, vous êtes bien placé pour proposer aux évêques concernés de faire un geste fort et compréhensible par tous :
Que l’Église rembourse les victimes de prêtres pédophiles de leurs séances psy pour pouvoir se remettre debout.
On ne peut pas comparer un prêtre ayant une relation, avec une femme ou un homme, avec un pédophile. Vous n’avez donc pas encore idée du nombre de victimes d’un pédophile ??? Et l’homme ou la femme en relation suivie avec un prêtre est il victime ??? Quelle confusion terrible !
N’est-il pas aussi très indélicat avec l’argent de l’Église de payer un cabinet pour soi et son entourage, en oubliant de proposer d’indemniser des victimes ?
Je suis témoin que des victimes ne sont pas instrumentalisées et sont soutenues par des prêtres et des laïcs qui aiment leur Église et qui les soutiennent au nom de cet amour-là.
Depuis longtemps. Avant les manifestations auxquelles vous faites référence. Et qui ont pris part à ces manifestations, pour certains.
Merci ++++
Tout est dit dans ton billet.
j’ai passé quelques jours à Lyon et y ai éprouvé de la tristesse entre malaise et colère..
Bien sûr que Barbarin doit démissionner et que les évêques devaient ouvrir les portes absolument et uniquement pour les raisons que tu donnes .
Il a paraît-il engagé un conseiller en communication ; il pourrait t’embaucher ….
Je n’en peux plus de cette présumée » cathophobie » qu’on appelle à chaque fois à la rescousse.
Je lis que le Chemin de Croix n’aura pas lieu dans les rues de Lyon par crainte d’incidents.
Alors quoi, on va s’enfermer dans nos églises ?
Que d’occasions manquées….
De fait, Brigitte, la « cathophobie », si souvent et si rapidement évoquée, a bon dos : il suffit d’avoir fait face à l’une ou l’autre victime pour comprendre qu’il ne s’agit en rien de « cathophobie ». Bien plus, certaines de ces victimes sont d’autant plus éprouvées qu’elles continuent de reconnaître dans l’Église et dans ses membres leur famille…
Non, le Cl Barbarin reste en place, à la fois pr dénoncer les dérives graves humaines, (comme l’a fait lePape Benoît 16) en toute loyauté … et responsabilité.. Et faire fi aux attaques contre l’Eglise , peut-être fomentées par la franc-maçonnerie , qui a la main mise dans bien des secteurs de vie. C’est mon opinion….
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Bonjour à tous,
Je ne partage pas cet avis.
Il à a un moment où l’Eglise doit défendre ses intérêts objectifs, et sa réelle motivation à régler les problèmes liés à la pédophilie. C’est le cas, et ceci est objectif : il n’y a qu’à regarder les faits dans le détail.
Il est une évidence que les victimes méritent à tout le moins une exemplaire compassion.
La maladresse et les mots de Monseigneur Barbarin ont été une catastrophe. Mais c’est une proie tellement facile pour les médias. Ils en ont abusé, aidés par le ministère de l’intérieur dont le directeur de la communication a été une victime. Les déclarations de responsables du gouvernement sont intolérables. Elles sont une oeuvre de destruction méthodique.
Les faits remontent à 25 ans. L’Education Nationale a déclaré 25 cas de pédophilie ou de pédo-pornographie ne serait-ce que l’année dernière. Avez-vous entendu une seule fois un recteur d’académie mis en cause ? La ministre a-t-elle manifesté une compassion elle-même ?
Certes, ce n’est pas une raison.
Il y a aussi des moments où le Christ était en colère et pas tendre…
Merci, Erwan, pour cette contribution, que je comprends sans la partager tout à fait. Pour au moins deux raisons :
1. S’il est vrai que l’Église de France dans son ensemble a entrepris, tardivement mais réellement, une révision profonde de ses pratiques, et le rassemblement de Lourdes vient encore de le manifester, il reste que, sur le terrain et dans les faits, les victimes sont encore loin de trouver l’accueil qu’elles méritent. Et qu’elles se heurtent encore trop souvent aux arguments de « cathophobie » ou de « prescription », pour ne citer que ceux-là.
2. Que l’Éducation Nationale, et d’autres institutions bien sûr, soient loin d’avoir fait le même travail, c’est probable (je ne suis pas bon juge) : mais j’ai rappelé dans mon article l’exemplarité nécessaire, non seulement de la personne de l’Église, mais aussi de son personnel (pour opérer une distinction « maritainienne »). Et c’est bien pour cette raison aussi, et pas seulement pour une hostilité que je ne conteste pas, que les faits d’Église sont si facilement mis en avant.
En fait, nous voyons la problématique de deux points de vue différents : d’un côté, celle d’un homme d’Eglise, sa vie offerte pour servir la miséricorde du Seigneur. D’un autre côté, un catho de base, qui vit sa foi tant bien que mal.
Et en tant que Catho de base, nous ressentons dans notre vie dans la Société une agression de longue date, une décrédibilisation de l’Eglise, et une mise à l’épreuve de notre foi (indifférence, moqueries) relativement au regard des autres.
Je ne suis pas sûr que la démission du Cardinal Barbarin aurait été un signe fort au démarrage de l’affaire, je suis même sûr de l’inverse. En revanche, après cet épisode de communication, ce n’est plus aussi sûr. L’actualité a relégué un peu l’affaire, il est peut-être encore temps de réagir…
Rappeler les faits, et rien que les faits, haut et fort serait un premier travail indispensable pour prendre ensuite une décision. Une démission n’en serait qu’un symbole plus fort.
je partage beaucoup de ce que tu écris dans ce billet, néanmoins je pense que la démission de Mg Barbarin, qui serait un geste très fort de sa part au regard de l’affaire de pédophilie qu’il a traitée en son temps de façon sans doute bien légère, serait aussi une réponse personnelle aux accusations et au lynchage médiatique et n’engagerait en rien la responsabilité de l’Église de France qui doit enfin agir de façon collective et exemplaire face à de tels actes.
La lecture de la lettre de Fr; Hervé Ponsot et celle, plus rapide, de certains commentaires m’amènent aussi à réagir.
A propos du cardinal Barbarin d’abord : persuadée que si celui qui a étouffé des affaires de pédophile avait été recteur d’académie …ou,( je vais oser le dire) de mosquée, de telles réactions ne se seraient pas produites , que les catholiques sont devenus une cible facile et n’ont pas, c’est le moins qu’on puisse dire, la faveur du public. Autrement dit, ce lynchage médiatique est bien orchestré par nos médias. Cela dit, le Cardinal Barbarin a l’art des paroles malheureuses, des réactions choquantes et excessives . Rappelons-nous ses amalgames douteux lors de l’adoption de la loi sur le mariage homosexuel: il avait dit en substance que c’était la porte ouverte à toutes les dérives, dont l’inceste!!! Le dimanche suivant, j’ai éprouvé un grand soulagement, une grande libération lorsque le frère H.Cornudet chargé de l’homélie au couvent de Lille a pointé du doigt cet excès. Etant moi-même opposée à ce mariage « pour tous », je ne me sentais aucunement solidaire de ce type d’arguments et j’ai été intérieurement reconnaissante à ce frère , à cette voix de l’Eglise qu’il fait bon entendre..
Et puis, autre réaction, plus proche cette fois,lorsqu’il a laissé échapper cette réaction (méfiez-vous de première parole, c’est toujours la bonne, disait…? Talleyrand? ): heureusement, pour les premiers faits reprochés, »il y a prescription!!! ».
Alors, je me dis que le lynchage médiatique qu’il subit actuellement a peut-être aussi ses sources ailleurs que dans le désamour de la, société pour les catholiques, que,disons-le, de telles réactions sont surprenantes d’inhumanité, une bien sotte inhumanité, incompréhensible chez un homme d’Eglise et en même temps dépourvues de compassion.Ces paroles injustes, déplacées, ont été certes prononcées dans le feu d’une interview mais elles contribuent à semer la confusion sur la personnalité du cardinal.
Association malheureuse aussi chez un des commentateurs ci-dessus, qui fait une bien curieuse demande: il faut que l’Eglise réagisse devant la pédophilie, mais aussi devant tout autre forme de vie maritale chez les religieux. Non, cher Monsieur Coulot, une vie hétérosexuelle ou homosexuelle chez un religieux est condamnable par l’Eglise mais la pédophilie, elle ,est un crime au regard de tous.
Oui, une démission du Cadinal Barbarin irait dans la voie de la clarté et éclairerait nos consciences.
Je ne connais pas bien le son de l’affaire..mais je suis très mal à l’aise. Et j’ai beaucoup d’interrogations (et pas de réponse)
Pourquoi n’y a t’il pas eu plainte à l’époque des faits par les victimes?
Qui était l’évêque de l’époque (qui a déplacé ce prêtre)?
j’ai l’impression que Monseigneur Barbarin est arrivé après les faits.
Quand à la cathophobie, je la vis tous les jours…et encore plus maintenant, j’en ai pour preuve le débat sur la laïcité ( à longueur d’ondes) qui va bien au delà de ce que prévoit la loi.
Juste quelques mots, Jean-Marie : sur le blog de La Parole libérée, la psychanalyste parle de « sidération » des victimes : elles ne peuvent pas « croire » ce qui leur est arrivé, venant de quelqu’un de confiance, membre de cette Église qu’elles aiment et à laquelle elles se confient. Sur le moment, et pendant des (dizaines d’) années souvent, il leur est impossible de parler de ce qu’elles ont vécu… Le corps est blessé, et la parole volée !
Je suis de près l’affaire « Preynat-Barbarin », je sors d’une projection de Spotlight et je suis heureux de pouvoir laisser mes impressions sur ce blog :
– Il est évident que le cardinal Barbarin subit un lynchage médiatique. Il n’a été nommé archevêque de Lyon qu’en 2002, soient 11 ans après les dernières exactions connues. Il n’a fait qu’entériner les décisions de ses prédécesseurs, en absence de faits nouveaux (la première dénonciation incontestable n’a eu lieu qu’à l’été 2014 (Alexandre reçu par Madame Régine Maire, ce qui a engendré un rapport transmis à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi)) ; n’importe quelle personne surchargée d’activités aurait, me semble-t-il, agi de même. En fait de jurisprudence de la République Française, j’ai trouvé un jugement rendu ces jours derniers à Tours vis-à-vis d’un instituteur de l’Ecole de la République coupable d’agressions sexuelles sur mineurs, qui ne demande une absence de contact avec les enfants que pendant une période de 10 ans.
– Au delà du cardinal Barbarin, c’est la gestion lamentable de l’Eglise Catholique Romaine qui est en cause. Même si l’approche de la pédophilie était différente dans les années 1980-1990, l’intérêt de l’ensemble des parties, des victimes et des victimes potentielles, de leurs familles (très souvent catholiques), des prédateurs s’ils souhaitaient s’amender (et s’ils ne le souhaitaient pas, ils n’avaient plus rien à faire dans l’Eglise), de l’Eglise elle-même, qui n’avait pas intérêt à voir sa réputation entachée par les actes d’un prêtre récidiviste, l’intérêt donc était de maintenir les pédophiles loin des enfants, en ne leur confiant que des tâches administratives ou en les isolant derrière les grilles d’un couvent (sans nécessairement les livrer au bras séculier et aux collaborateurs de Fouquier-Tinville). Par sa gestion catastrophique, l’Eglise catholique n’a-t-elle pas commis un crime contre l’Esprit, celui dont il est dit dans les Evangiles qu’il ne saurait être pardonné ?
– Personnellement, j’ai été élevé chez les curés, comme on disait à l’époque, et je ne m’en plains pas. Même si on sentait bien que l’idée du sexe préoccupait certains de nos éducateurs, ils ne passaient pas aux actes et en fait ils n’étaient que soumis à la loi commune des personnes frustrées. Mais un ex-responsable de mon ancienne paroisse purge une peine de prison pour pédophilie et même les bigotes patentées qui surveillent les allées et venues du clergé n’avaient rien remarqué. Ce fait et les autres révélations des exactions des prêtres m’avaient écoeuré, presque jusqu’à la nausée, et j’ai pendant des années rejoint les rangs des laïcards anticléricaux majoritaires dans mon milieu professionnel. Je suis revenu à l’Eglise, longtemps après, pour d’autres raisons.
– Donc, je considère le cardinal Barbarin simplement coupable de légèreté mais c’est au gouvernement de l’Eglise que va mon ressentiment. Il est quand même paradoxal que le Père Preynat n’ait pas été sanctionné (on ne saurait considérer les 6 mois passés chez les Petites Soeurs des Pauvres, qui l’ont probablement bichonné, comme une lourde pénitence) alors que dans mon enfance (et aujourd’hui aussi sans doute, je ne me confesse plus à un homme) toute peccadille avouée en confession faisait l’objet d’une « réparation ou satisfaction ».
– Après que la République Française a réglé le dossier (qui va sans doute aboutir sur un non-lieu ou à des débats sans fin sur les délais de prescription), j’aimerais que le Pape François le prenne en considération sur le plan moral (et il mérite une attention particulière, vu son hypermédiatisation). Je doute cependant fort qu’il le fasse, étant donné son amitié pour le cardinal, quitte à ce que les rangs des catholiques français s’éclaircissent encore davantage. Enfin, il est toujours permis d’espérer…
Je viens un peu tard dans la discussion et je m’excuse de cette « voix » anglo-belge. Dans les embarras du Cardinal Barbarin il y a néanmoins un certain lynchage médiatique car on a peu fait les détails juridiques de la situation. Nous avons vécu un lynchage semblable du Cardinal Daneels. Il est vrai que peut-être nos prélats n’ont pas tout de suite trouvé le langage adéquat, mais les médias semblent volontairement taire la réalité judiciaire – que les faits sont prescrits. On peut avouer que la prescription est une immense question en elle-même. Mais il y a un élément qui me chiffonne beaucoup: dans tout ce débat on parle peu, ou pas du tout, de l’étrange attitude de Jean-Paul II. Quand le Cardinal Ratzinger l’avait prévenu au début des années ’80 que ce problème remontait à la surface et qu’il fallait prendre position et clarifier tout, J-P II semblait préférer ne pas entendre. Pire, il manifeste une amitié pour le fondateur des « Légionnaires du Christ » – personne notoire comme « prédateur » et qui vivait en flagrant mensonge par rapport à son statut de prêtre. Plus tard, le Cardinal Ratzinger devenu Pape Benoît XVI prend l’éclatement de la vérité sans jamais faire savoir que l’Église institutionnelle avait « perdu » 20ans de possibilités d’améliorer la situation, d’offrir à ses prélats une meilleure « feuille de route » pour le problème de la pédophilie. Dans des moments de « colère », je me pose la question quant à la sanctification de J-P II à la lumière de cette situation. D’autre part, je continue à croire que parmi nos évêques il y a une meilleure réponse qui se développe et une meilleure attitude pastorale envers les victimes et un traitement plus clair et ferme envers les abuseurs. Peut-on espérer qu’un jour l’Église fera un vrai travail de réflexion sur son « anthropologie » – sur l’être humain comme être sexué, incarné, mais appelé à un amour transcendant?
Merci, Philip, pour cette réflexion dont je partage l’essentiel. Il est aujourd’hui évident que JP II a fait montre d’un grand laxisme, pour ne pas dire plus, dans la gestion de ces affaires, en particulier du côté des Légionnaires. Mais aux dires de plusieurs « victimes », justement du côté des Légionnaires (voir ce qu’en dit Xavier Léger sur le site l’envers du décor), et quoi qu’on dise le contraire sur la place publique, Benoît XVI n’aurait pas fait beaucoup mieux ou beaucoup plus… C’est donc un traitement laxiste assez général qui a longtemps régné au Vatican, et je me demande si cela n’est pas aussi, voire même en priorité, imputable à la congrégation pour la vie religieuse, habituellement débordée, et qui n’a pas vu ou voulu voir la gravité des questions.