Le règne de la confusion

confusionÉtrange idée qui m’est venue ce matin de rédiger un billet sur ce thème de la confusion, alors que je sors d’un petit épisode d’ictus amnésique, autrement dit d’un moment d’absence pendant lequel on ne sait plus trop bien où l’on est et ce que l’on fait. Mais non, l’épisode n’y est pour rien, il fut limité dans le temps, la réflexion naît d’ailleurs, et elle n’est pas récente : la lecture fréquente du courrier des lecteurs en ligne de tel ou tel journal m’a déjà conduit à m’interroger sur la dite confusion. Combien de réactions immédiates mal ou peu informées, combien de billets rédigés sous le coup de l’émotion, qui empêchent d’entendre vraiment ce que disent les autres ou de faire appel à la mémoire et à la raison avant de poster ? Avec pour résultat, rien qui fasse avancer la réflexion.

Ce matin, une personne de tradition chrétienne me confiait tout le bien qu’elle ressentait dans ces moments troublés à écouter la chanteuse Tania Kassis dans son « Ave Maria islamo-chrétien » que l’on peut trouver si facilement sur Youtube : la voix est magnifique, l’émotion palpable, et je ne mets pas en doute la volonté de rapprocher les religions qui anime la chanteuse libanaise, sur une terre plongée dans d’innombrables conflits inter-religieux. Mais… dois-je accepter sans broncher le titre même de cette chanson ? N’est-il pas évident en outre que, pour une oreille musulmane, qui connaît sa tradition et la place qu’elle réserve à Marie, mère d’Issa le prophète, une chanson qui commence par l’appel du muezzin, même tronqué, et se poursuit par un Ave Maria, va contribuer à renforcer l’image de Marie telle qu’elle existe dans cette tradition ? Assez loin de la tradition chrétienne dans laquelle est né cet Ave Maria. Rapprochement vraiment ? La personne dont je parle me l’affirme (1), mais pour ma part, faute peut-être d’un cadre précis et d’explications adéquates et préalables, je continue à y reconnaître une source de confusion, générée il est vrai par de « bons sentiments ».

Dans un tout autre domaine, maintenant, j’apprends que notre président de la République, interviewé à la télévision après le meurtre du prêtre Jacques Hamel, aurait déclaré : « tuer un prêtre, c’est profaner la République ». Il faut lire la réaction vive et justifiée du Père Pierre Vivarès, curé de l’église saint-Paul à Paris : il s’agit d’un abus de langage qui vise à sacraliser une « réalité » toute séculière qu’est la République. Une confusion dont on peut douter qu’elle soit involontaire, comme l’explique notre prêtre sur sa page Facebook.

Les deux exemples de confusion que je viens de donner ne sont que quelques modalités d’une situation plus générale : certains y verront la main de Satan, mais avec C. S. Lewis dans son fameux Tactique du diable, je crois ce dernier trop malin pour se laisser identifier facilement. Non, une telle réponse est trop facile et ne résout rien. Il me semble plus juste de remettre au goût du jour la vertu de prudence, et d’appeler à un meilleur discernement : dans les temps qui sont déjà les nôtres, avec la globalisation de l’information, avec la rapidité et la multiplication des instruments de communication, il faut donc ne pas (sur)réagir, prendre de la hauteur, laisser du temps au temps comme on a maintenant coutume de dire, et ne jamais oublier que le Seigneur nous a donné une raison qui doit régir l’émotion. Sans se laisser bien sûr gagner par la sécheresse. Un juste milieu qui n’est jamais facile à trouver, mais qui se révèle et se révélera plus que jamais indispensable.

P. S. Un lecteur me signale que Jésus, dans l’évangile, au travers de son rapport aux pécheurs ou aux publicains par exemple, crée de la confusion. C’est vrai en apparence, mais en réalité, comme tous les prophètes, il corrige un (dés)ordre établi, il remet de l’ordre et éloigne en fait la confusion. Même si, dans un premier temps, les gens autour de lui ont pu penser, nous-mêmes aussi peut-être, qu’il la créait.

(1) Voir la présentation qui en est faite sur la page Facebook de l’auteur, et les approbations reçues.

Une réponse à “Le règne de la confusion”

  1. Je ne tue ni ne massacre , pas parce que je suis républicain et que mon prochain est républicain, mais parce qu’il est fils de Dieu, créé par Dieu donc sacré, comme moi , et il est mon frère

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