Dons de l’Esprit et réactions

Si l’effet majeur de la Pentecôte fut en interne la formation d’une nouvelle communauté, aux règles strictes, sa manifestation extérieure s’exprime en particulier par des guérisons : les sommaires l’annoncent, mais Luc a jugé bon d’en donner un exemple précis à travers la relève d’un impotent (3,1-10). Cette guérison va à elle seule générer des réactions diverses, que le même Luc va interpréter grâce à deux discours de Pierre : le premier prononcé en public à destination des « hommes d’Israël » (3,11-26), le deuxième prononcé dans le cadre du Sanhédrin à l’intention des cadres de la nation, les « chefs des peuples et anciens » (4,1-22).

 

A.   La relève de l’impotent

 

1 Pierre et Jean montèrent au Temple à la neuvième heure qui était celle de la prière. 2 Et voici qu’un homme y fut apporté, impotent depuis le ventre de sa mère, et placé à la porte du Temple dite la Belle, pour demander l’aumône à ceux qui y entraient. 3 Voyant Pierre et Jean sur le point d’entrer dans le Temple, il demanda à recevoir une aumône. 4 Alors Pierre le fixa du regard, ainsi que Jean, et dit : « Regarde-nous. » 5 Il les observait s’attendant à recevoir d’eux quelque chose. 6 Mais Pierre dit : « De l’argent et de l’or, je n’en ai pas. Mais ce que j’ai, je te le donne : au nom de Jésus Christ le Nazôréen, marche ! » 7 Et le saisissant par la main droite, il le releva. À l’instant les pieds et les chevilles de l’homme s’affermirent ; 8 d’un bond il fut debout, et le voilà qui marchait. Il entra avec eux dans le Temple marchant, bondissant et louant Dieu. 9 Tout le peuple le vit marcher et louer Dieu ; 10 on le reconnaissait : c’était bien lui qui demandait l’aumône, assis à la Belle Porte du Temple. Et les gens furent remplis d’étonnement et de stupeur de ce qui lui était arrivé.

 

La guérison de l’impotent est d’abord une question de regard : voyant Pierre et Jean, Pierre le fixa du regard, regarde-nous, il les observait… Les verbes grecs ne sont pas tous les mêmes, ils expriment des pensées et des intentions différentes. Mais ils témoignent tous d’une relation intense qui s’établit progressivement. En regardant Pierre les yeux dans les yeux, l’impotent, habitué qu’il était sans doute à regarder le sol, prend de la hauteur : il voit Pierre et au-delà de Pierre. Redressé par la main tendue[1], guéri, il vient à sa hauteur. C’est bien d’une résurrection qu’il s’agit. Et l’insistance porte ensuite sur la marche : les pieds et chevilles, le bond, la station debout, la marche proprement dite.

L’agencement de l’ensemble du texte met en valeur la partie centrale, autrement dit le verset 6 : les paroles sont de Pierre, mais l’agent efficace est le nom de Jésus. Ce nom, qui est une manière d’évoquer la personne même de Jésus, son « aura », joue un rôle considérable dans les Actes : 2,21.38 ; 4,7.17.18 ; 5,28.40.41 etc.

On peut noter d’ailleurs une forme de construction en chiasme qui manifeste la centralité de la parole de Pierre :

 

De l’argent et de l’or

       Je n’en ai pas

       Ce que j’ai, je te le donne

Au nom de Jésus-Christ le Nazôréen, marche.

 

Le résultat de la parole de Pierre est un renversement complet de situation : l’homme était déposé, en dehors du Temple, abandonné à son sort au début du récit (v. 2) ; à la fin (v. 8-10), le voilà debout, bondissant, entrant dans le Temple, environné d’une foule qui s’étonne. On notera le « on le reconnaissait », qui laisse entendre que l’impotent a regagné sa place dans la société du temps.

 

 B.   Le troisième discours de Pierre

 

11  Comme il ne lâchait pas Pierre et Jean, tout le peuple frappé d’étonnement accourut vers eux au portique dit de Salomon. 12 À cette vue, Pierre s’adressa au peuple : « Hommes d’Israël, pourquoi vous étonner de cela ? Qu’avez-vous à nous regarder, comme si c’était par notre propre puissance ou grâce à notre piété que nous avons fait marcher cet homme ?

13 Le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, le Dieu de nos pères a glorifié son serviteur Jésus que vous, vous avez livré et que vous avez renié devant Pilate, alors qu’il était décidé à le relâcher. 14 Mais vous, vous avez chargé le Saint et le Juste ; vous avez réclamé la grâce d’un assassin, 15 tandis que vous faisiez mourir le prince de la vie. Dieu l’a ressuscité des morts : nous en sommes témoins. 16 Et par la foi en son nom, à cet homme que vous voyez et connaissez, ce nom même a rendu la force, et c’est la foi en lui qui, devant vous tous, l’a rétabli en pleine santé.

17 « Cependant, frères, je sais que c’est par ignorance que vous avez agi, ainsi d’ailleurs que vos chefs. 18 Dieu, lui, a ainsi accompli ce qu’il avait annoncé d’avance par la bouche de tous les prophètes, que son Christ souffrirait. 19 Repentez-vous donc et convertissez-vous, afin que vos péchés soient effacés, 20 et qu’ainsi le Seigneur fasse venir le temps du répit. Il enverra alors le Christ qui vous a été destiné, Jésus, 21 celui que le ciel doit garder jusqu’aux temps de la restauration universelle dont Dieu a parlé par la bouche de ses saints prophètes.

22 Moïse, d’abord, a dit : Le Seigneur Dieu vous suscitera d’entre vos frères un prophète semblable à moi ; vous l’écouterez en tout ce qu’il vous dira. 23 Quiconque n’écoutera pas ce prophète sera exterminé du sein du peuple. 24 Tous les prophètes, ensuite, qui ont parlé depuis Samuel et ses successeurs, ont pareillement annoncé ces jours-ci. 25 « Vous êtes, vous, les fils des prophètes et de l’alliance que Dieu a conclue avec nos pères quand il a dit à Abraham : Et en ta postérité seront bénies toutes les familles de la terre. 26 C’est pour vous d’abord que Dieu a ressuscité son Serviteur et l’a envoyé vous bénir, du moment que chacun de vous se détourne de ses perversités. »

 

La cause, mais l’on serait tenté de dire « le prétexte », est une guérison effectuée par Pierre. Cette guérison est un signe de la venue du Royaume, et l’apôtre se doit de l’expliquer à ses auditeurs.

Mais avant de nous tourner vers cette interprétation, rappelons que de nombreux commentateurs  estiment que ce récit a une sorte de valeur emblématique puisque l’on en retrouve une sorte de dérivé en 14,8-10, avec plusieurs points de contact :

1. Un homme, impotent de naissance (3,2 ; 14,8)

2. L’auteur du miracle fixe les yeux (atenizein : 3,4 ; 14,9) sur l’impotent

3. L’impotent se dresse sur ses pieds et marche alentour (hypotaxis en 3,8 ; parataxis en 14,10)

4. À quoi il faut ajouter le motif de la foi, développé en 3,16, intégré en 14.

Il s’agit sans doute d’établir un parallèle entre Paul et Pierre.

 

Structure du discours

 

L’apostrophe, « hommes d’Israël », est l’une de celles que nous avons rencontrées au chapitre précédent : elle débute un questionnement sur l’origine, qui couvre le verset 12.

À partir du verset 13, Pierre passe d’emblée à la prédication kérygmatique, d’une manière d’ailleurs assez agressive, en chargeant fortement son auditoire : les « vous » se multiplient, accusateurs. Avec le verset 16, et l’évocation du retour à la santé de l’impotent, se clôt le discours relatif à l’incident : il ne sera plus question ensuite de cet impotent.

Avec le verset 17, on assiste à un retour en force du pronom vous, dans une ambiance toute différente : les Juifs sont dédouanés en bloc, chefs y compris. Ce changement brutal de tonalité surprend : on a le sentiment que Luc suivait une source, et que maintenant, il livre son opinion personnelle. Ce qui voudrait dire alors que la christologie accusatrice des versets 13b-15a, avec ses titulatures spécifiques, Saint, Juste, prince de la vie, est moins la sienne que celle de sa source.

Et apparaît une insistance sur la prophétie, évoquée au verset 18 comme plus loin au verset 21, et pour conclure, au verset 24 : cette prophétie justifie l’événement. Mais quel événement ? On notera en effet que la résurrection n’est pas ici évoquée, et il faudra y revenir plus bas ; l’événement est-il « que son Christ souffrirait », ou que la restauration universelle doit advenir ? Impossible à dire précisément.

En tout cas, les versets 25-26 forment une sorte de conclusion, une invitation que Pierre adresse à ses auditeurs pour « entrer dans le jeu ».

 

Les différentes parties

 

La relève de l’impotent (v. 12-16)

 

Passons rapidement sur l’introduction du verset 12 : l’accent porte sur le « hôs idia », autrement dit sur le caractère personnel de la puissance ou de la piété. Cette possibilité est d’emblée écartée, et il importe donc de trouver une autre origine au miracle.

Tout au long de notre passage, la formulation est très juive : « Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob », « son serviteur », « le Saint et le Juste », le « prince de la vie ». On l’a dit plus haut, tout ceci pourrait bien être le signe que Luc recours à une source antérieure.

Bien sûr, on rencontre bien des éléments lucaniens : pas seulement la réhabilitation de Pilate, tout à fait conforme à ce que l’on peut trouver dans l’évangile de Luc (cf. 23,16.22), ou le thème du nom dont il sera question plus bas, mais aussi un vocabulaire et une manière de mettre en cause les auditeurs comme on peut les retrouver dans le discours d’Étienne au chapitre 7 verset 52 : « Lequel des prophètes vos pères n’ont-ils point persécuté ? Ils ont tué ceux qui prédisaient la venue du Juste, celui-là même que vous venez maintenant de trahir et d’assassiner ». Mais justement, n’avons-nous pas, dans l’ensemble de ces versets, au chapitre 3 comme au chapitre 7, l’écho de controverses entre juifs hellénistes et juifs ? Même si la rédaction finale est lucanienne, ne serions-nous pas en présence d’un fonds plus ancien judéo-chrétien-hellénistique glosé par Luc ?

Le qualificatif « Juste », entendu comme une titulature, se retrouve en Ac 22,14, mais est absent ailleurs du NT. Les commentateurs trouvent l’origine de cette titulature le plus souvent en Is 53,11, d’autant plus qu’il est associé là au thème du serviteur, bien présent dans notre passage. Sans doute, mais on ne devrait pas écarter trop vite la médiation sapientiale, qui est peut-être elle-même réflexion sur Isaïe : dans le livre de la Sagesse, particulièrement en ses chapitres 3 à 5, il est question de l’oppression du juste ; il est d’ailleurs frappant que le juste, dans ce livre de la Sagesse, est retiré du monde par Dieu, et « mis en sûreté », sans que l’on sache précisément où : c’est un peu le thème que l’on retrouve plus loin dans le verset 21 de ce chapitre 3.

Sur le fond, tout notre passage joue sur l’opposition mort-vie (vie au sens large, incluant la santé) : les juifs ont voulu la mort du prince de la vie, Pilate sa vie. Il est finalement mis à mort, mais Dieu lui rend la vie (la formule est celle que l’on a vue en 2,32, avec la mention très lucanienne du témoignage, présente aussi en 5,30 ; 10,40-42 ; 13,30-31 etc.), et, à travers lui, à tous les hommes qui lui accordent leur foi : en particulier à l’impotent.

Dans ce contexte, la titulature « prince de la vie » prend une signification forte. Elle est unique comme telle dans le Nouveau Testament ; mais l’expression « prince » ou « chef » (grec : archêgos) se retrouve en 5,31, une fois de plus dans la bouche de Pierre, et dans la lettre aux Hébreux (2,10 ; 12,2). Elle présente Jésus comme celui qui conduit à la vie, qui y est d’ailleurs entré le premier.

Pour participer à cette vie, il faut manifester la « foi au nom de Jésus ». Ce thème du nom sauveur est largement développé dans les Actes, en particulier au chapitre 4 (7, 10, 30), ou en 10,43 ; 16,18 etc. Ce verset 16, après la proclamation « classique » de 15b, apparaît bien comme un commentaire lucanien de 3,6.

 

Le rôle de la passion (v. 17-24)

 

Le discours aurait pu s’arrêter là, mais il continue : après avoir dédouané Pilate, Pierre dédouane ses auditeurs qu’il vient pourtant de prendre violemment à partie. L’excuse donnée aux Juifs est en fait double : l’ignorance d’une part, mais aussi l’accomplissement du plan salvifique de Dieu. Dieu s’est en quelque sorte servi de l’ignorance des Juifs, manifestant ainsi son éternelle providence : nous sommes assez proches de ce que Paul exprime en Rm 11,30-32.

Mais cette providence est aussi considérée comme un accomplissement, celui de l’Écriture : on sait que c’est là le thème du début de l’évangile de Matthieu, mais l’on constate donc que Luc n’est pas absent de ce débat. Avec toutefois une orientation particulière : comme Luc le redira en 17,3, tout est accompli, y compris les souffrances de Jésus qui sont donc présentées comme annoncées par l’Écriture (J. Dupont invite à comparer pour s’en assurer Lc 18,31 et Mc 10,33). Nous sommes au-delà de 2,23 où les promesses prophétiques portaient seulement sur la « tradition » de Jésus et non sur ses souffrances. Luc ne dit pas quel texte d’Écriture prophétise les souffrances de Jésus, mais on n’en peut guère retenir d’autre que Sagesse (2,18-20) ou Isaïe (52,13 – 53,12), textes que la liturgie des Ténèbres retient pour les jours saints.

L’expression « que son Christ souffrirait », avec verbe à l’infinitif en grec, se trouve déjà en Lc 24,26.46 : elle est donc un lucanisme. Ce qui laisse penser que le verset 17 qui précède, est lui aussi de la main de l’évangéliste : si la mise en accusation peut donc être attribuée au courant judéo-hellénistique, l’excuse de l’ignorance doit donc représenter la véritable position lucanienne. Elle est conforme à sa volonté constante dans les Actes d’aplanir les difficultés ou oppositions, mais aussi à sa vision de l’histoire : Dieu commande les temps et les moments (cf. Ac 1,7), la responsabilité de l’homme est donc indirecte.

 

Comme Dieu commande l’histoire, la passion de son fils a une valeur salvifique : d’où l’invitation au repentir. Les noms et verbes de la racine grecque metano– apparaissent quatre fois chez Matthieu, trois fois chez Marc, jamais chez Jean, mais 21 fois dans l’ensemble Luc/Actes, à parts égales entre les deux textes ; on pourrait dire presque la même chose du deuxième verbe « convertissez-vous » (grec : epistrephein). C’est dire combien ces deux thèmes ont les faveurs de Luc, en particulier dans les discours : 2,38 ; 5,31 ; ils sont reliés de quelque manière à cette idée de la miséricorde, si chère au cœur de Luc. J. Dupont fait observer qu’en dehors de Jérusalem, la rémission des péchés n’est pas attachée au repentir, mais à la foi : cf. 10,43b ; 13,38-39.

 

Les versets 20-21 sont étranges : ils reflètent des conceptions christologiques très originales. Il y est successivement question d’un « temps du répit » puis d’un « temps de la restauration universelle », et au milieu de tout cela d’un « Messie destiné », mais d’abord « gardé au ciel ». Ici, nous sommes loin des lucanismes évoqués précédemment.

 

1.    Le terme grec utilisé pour répit (v. 20a) est ce que l’on qualifie d’hapax, c’est-à-dire un terme utilisé une seule fois dans le Nouveau Testament : il évoque un renouvellement de la « psyché ».

2.    Au verset 20b, apparaît le participe parfait d’un verbe qui signifie « avoir à portée de la main, choisir », et on le retrouve en 22,14 et 26,16 (traduit successivement dans la B.J. par destiner et établir), autrement dit dans des discours. Il semble bien devoir se traduire par « Jésus destiné à être Messie pour vous » (cf. note sur BJ 98). Pour Luc, il est clair que cette messianité existe depuis la naissance de Jésus, mais peut-être pas pour l’auteur du texte qu’il semble reprendre ici.

3.    Quant au terme utilisé pour la restauration, il aura une grande fortune postérieure : il s’agit de l’apocatastase. Le dictionnaire Oxford de l’Église chrétienne parle d’une doctrine morale selon laquelle toutes les créatures morales y compris les démons, partageront un jour la grâce du salut, et il ajoute que cette doctrine fut condamnée par le Concile de Constantinople en 543, après avoir été professée pourtant par Clément d’Alexandrie, Origène et Grégoire de Nysse. Pour en rester au texte biblique, constatons que des termes de même racine se trouvent en Mt 17,11 et Hb 13,19, dans le dernier cas avec un sens affaibli et banal ; et constatons encore que Luc présente la doctrine en question comme annoncée par les prophètes.

4.    Restent les thèmes « destiné » et « gardé au ciel » : le deuxième est un verbe beaucoup plus usuel dans le NT, et qui signifie « accueillir, recevoir, prendre, accepter ».

 

Force est de reconnaître que nous sommes là en présence de pensées très singulières, avec un vocabulaire qui, s’il se retrouve quelque peu en 17,30-31, n’est pas vraiment celui de Luc  : il est plutôt celui de la première communauté chrétienne (cf. 1 Th 1,9-10), dans laquelle l’attente du retour du Messie était vive (selon J. Dupont qui cite 1 Co 11,26 ; 16,22 ; Lc 22,15-18 ; mais C. H. Dodd doute de la vivacité de cette attente ). Comme on sait toutefois que l’auteur prend soin de composer ses discours avec des thèmes que leurs auteurs supposés auraient pu employer, on peut légitimement se demander si la christologie ici présentée ne serait pas celle de Pierre : Cullmann, à partir de 3,13.24.26 et 4,25.27.30, autrement dit de la christologie dite du « Serviteur de Dieu » et des échos qu’elle trouve en 1 P 2,21-25, le pense . On va voir tout de suite que Cullmann pourrait bien avoir raison.

 

Conclusion du discours (v. 25-26)

 

Les deux derniers versets sont une exhortation à suivre le Christ. On y trouve quelques thèmes qui sont chers à Luc, mais traités d’une manière qui peut poser question et laisser supposer que Luc recourt à quelque source :

 

1.    Le message de salut s’adresse d’abord aux Juifs : « vous êtes, vous, les fils de l’alliance », « c’est pour vous d’abord ». Cette idée est conforme à la vision lucanienne, elle sera reprise dans la suite des Actes lorsqu’on verra par exemple Paul commencer sa prédication dans les synagogues (9,20 ; 13,5.14 ; 14,1 etc.) avant de se tourner, presque par dépit, vers les païens (13,46) ; on ne peut qu’être frappé par la coïncidence avec la position de Paul, telle qu’elle s’exprime par exemple en Romains (1,16 ; 2,10). Mais est-ce là simplement une idée de Luc, ou bien appartiendrait-elle à une source pétrinienne ?

2.    La question mérite d’être posée parce que la proximité avec la littérature paulinienne, qui paraît d’autant plus se vérifier que le texte de Luc fait ici référence à Gn 12,3 comme Paul en Ga 3,8, se trouve néanmoins bousculée par le fait que cette référence ne sert pas ici, comme chez Paul, à justifier la mission aux païens, mais bien à justifier la priorité juive. Dès lors, on est conduit à se demander si c’est Luc qui parle, ou si c’est bien Pierre que Luc fait parler et dans la bouche duquel on comprendrait de tels propos.

Cette thématique du nouveau prophète semblable à Moïse, présentée au verset 22 à partir du verset bien connu Dt 18,15, et reprise au verset 26, trouvera d’autres échos chez Luc comme on le verra plus loin.

 

Le début du chapitre 4 nous offre un nouveau discours de Pierre, mais il est prononcé dans un contexte d’hostilité très différent de celui qui présidait aux précédents discours : les textes scripturaires qui sont invoqués (Ps 118,22 et Ps 2,1-2) prennent en compte cette hostilité.

 


[1] On aurait pu attendre de la part de Pierre un « lève-toi et marche », proche des paroles de Jésus (Lc 5,23-24//) : c’est d’ailleurs ce que proposent certains manuscrits. Mais rien de tel, Pierre n’est pas Jésus, c’est la main qui relève, ou plutôt qui maintient debout. Tout ceci suggère que Pierre n’est qu’un intermédiaire.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.