Rencontrer les victimes change le regard et la compréhension

Que d’échanges en ligne sur la question des victimes d’emprise affective ou psychologique ! Tout le monde a un avis sur elles, sur ce qu’elles auraient dû faire, sur ce qu’elles n’ont pas fait, sur ce qu’elles pourraient ou devraient faire, sur leur silence que d’aucuns pensent incompréhensible, sur leur prétendu consentement ou leur incroyable faiblesse, sur le poison qu’elles distillent au sujet des personnes et des institutions, et je peux allonger la liste. Elle m’horrifie, et je gage que 90% ou peut-être plus des internautes qui s’expriment de la sorte n’ont jamais rencontré une seule de ces victimes… 

Parce que lorsqu’on en a rencontré plusieurs dont les témoignages sont concordants, mais même parfois une seule qui ose s’attaquer à une figure que beaucoup ont sacralisée, qui sait qu’en parlant, son témoignage sera mis en doute ou écarté (ce qu’on appelle parfois la « double peine », celle de l’emprise conjuguée à celle de l’incrédulité), qui a du mal souvent encore à trouver les mots pour dire la dévastation qui est la sienne et que rien, jamais, ne pourra vraiment guérir, alors l’auditeur doté d’un minimum d’empathie ne peut plus considérer tous ces abus comme des inventions et les victimes comme des mythomanes attachées à détruire les personnes ou  les institutions que j’évoque, et parmi lesquelles bien sûr se trouve l’Eglise catholique.

Ce même auditeur comprend combien il a fallu de temps et de courage aux victimes pour sortir de l’emprise dont elles ont pâti, il comprend qu’elles ne puissent plus se taire tant que justice ne leur a pas été rendue, il comprend qu’il faut aller au fond des choses au risque de déboulonner quelques idoles ou de fragiliser les institutions. Il comprend en fait qu’il n’y a pas prescription, qu’il ne peut y avoir de prescription parce qu’il faut voir dans ces abus des crimes.

Voilà pourquoi il faut rencontrer les victimes, les laisser parler autant de temps qu’il le faudra, les écouter, les soutenir. Et si cela ne peut se faire directement, au moins écouter leur témoignage, dont on trouve maintenant plusieurs exemples en ligne, toujours d’une dignité exemplaire. Je vais en évoquer deux :

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