Prédication donnée le dimanche 21 avril 2024 au monastère des moniales dominicaines de Dax Textes : Actes 4,8-12 et Jean 10,11-18.
Mes sœurs, chers amis, il est clair que les brebis dont parle Jésus dans notre évangile ne sont pas seulement celles qui ont été guéries par lui, mais toutes celles qui ont été sauvées. Et ce n’est pas tout à fait pareil. Dans le texte des Actes des Apôtres qui nous est proposé aujourd’hui en première lecture, même si l’infirme a de fait été guéri, il n’est question que de son salut. Et voilà pourquoi, au-delà de la guérison, il ne lâche plus Pierre et Jean.
Il arrive pourtant que certains traducteurs de la Bible utilisent indifféremment le verbe guérir et le verbe sauver. La traduction liturgique ne s’y est pas trompée, et tant mieux. Vous comprenez tous en effet que si Jésus ou les apôtres ont guéri bien des personnes comme cet infirme au cours de leur vie, ils n’ont pas fait que guérir. Leur propos allait plus loin : ils les ont sauvées. De quoi ? Telle est bien la question qui vient immédiatement à l’esprit, et il existe de très nombreuses réponses possibles : de leur péché, de leur errance, de leur enfermement. Et de leur isolement pour l’infirme auquel les apôtres ont rouvert le chemin de la communion avec son entourage, et en définitive avec Dieu.
La distinction est importante parce qu’elle confère une envergure unique à leur action. À l’époque de Jésus il existait, et il existe encore aujourd’hui, de nombreux individus que l’on considérait comme des guérisseurs, et ils l’étaient ou le sont peut-être. Mais des prophètes et des acteurs du salut, cela ne courait pas les rues ni ne les court encore aujourd’hui.
La distinction est importante pour une autre raison. Je ne sais pas si l’on peut compter nombre de guérisseurs dans notre assemblée d’aujourd’hui mais, dans la mesure où c’est l’Esprit saint reçu au baptême qui établit tel un chrétien, je suis sûr qu’il s’y trouve beaucoup d’acteurs du salut. Non pas en termes de performance, mais du fait qu’ils sont pleinement dévoués à Dieu et à leur prochain qu’ils reconduisent vers Dieu.
Rappelez-vous les Douze envoyés en mission par Jésus. Ils ne sont pas très équipés pour s’avancer au milieu des loups, mais ils parviennent quand même à guérir et enseigner. Je cite saint Marc : « Étant partis, ils prêchèrent qu’on se repentît ; et ils chassaient beaucoup de démons et faisaient des onctions d’huile à de nombreux infirmes et les guérissaient. » (6,12-13).
Mes sœurs, mes amis, nous ne sommes ni les Douze ni leurs successeurs. Peut-être avons-nous, ou pas, le charisme de guérison. Je suis néanmoins convaincu que nos paroles et nos actions, aussi modestes soient-elles, qui contribuent à réorienter le troupeau et à le rassembler autour de l’unique pasteur, Jésus, sont des actes de salut pour nos frères comme pour nous.