Koz toujours

Koz toujoursBien sûr, presque tout le monde connaît ou croit connaître Erwan Le Morhedec, blogueur catholique revendiqué et réputé sur Koztoujours. Et c’est sans doute justement parce qu’il est déjà bien ou trop connu que son livre, Koz toujours, ça ira mieux demain (Éditions du Cerf, 2015), risque de passer à la trappe sans intéresser personne : ne sait-on pas déjà ce qu’il dit ou pourrait nous dire ?

Eh ! bien, pour avoir été a priori de ces gens-là, je n’ai plus qu’à me rattraper, et à me faire le héraut de cet ouvrage : sur les nouvelles technologies, sur la laïcité, sur les papes Benoît XVI et François, sur tout ce qui touche à l’Église, voilà un ouvrage non seulement rafraîchissant et bien écrit, mais encore extrêmement percutant. Au fil de la lecture, on voudrait tout citer, mais je vais me contenter de reprendre ici quatre passages pour tenter de mettre mes lecteurs en appétit :

  1. Sur le temps :  » Avant Facebook, qui l’a suivi dans cette voie, Twitter s’est fait le chantre d’un temps réel : aussitôt émises, les informations sont reçues. Et quand Facebook l’a rejoint, on a célébré la mise à jour technologique, sans songer à ses effets. Le direct a parfois des vertus, mais le temps qui demandait du temps, le bon vieux temps, celui de nos parents comme celui de notre enfance, n’était-il pas réel ? En fait de réel, on nous a refourgué l’immédiateté. Voilà le temps réel de notre époque : un temps qui n’en a plus, un temps qui abolit celui de la délibération, de la méditation, du discernement ».
  2. Sur le témoignage à donner en tant que chrétien :  » Si nous sommes si peu nombreux qu’on le dit, à tout le moins comme pratiquants, pouvons-nous nous offrir le luxe de laisser deviner à qui voudrait bien y prêter une attention soutenue qu’il pourrait y avoir là une voie, un chemin, la vérité, la vie ? Si nous croyons que notre foi est fondée, que le christianisme porte aussi une sagesse pour le temps présent, sans oriflammes ni cymbales peut-être, nous devons simplement le dire. Le cas des jeunes qui se convertissent à l’islam – sans parler des conversions pathologiques à un islam radical – est emblématique et ne peut que nous interpeller. Nombre d’entre eux ne voient que des musulmans prendre leur foi au sérieux, prier, observer les règles de leur religion. Sans adopter une manière de vivre la foi qui n’est pas la nôtre, ni verser dans un légalisme exclu par le Christ, il s’agit de faire découvrir à notre monde la richesse de la foi qui a été source d’inspiration de leur pays pendant des siècles. Il s’agit d’être là ».
  3. Sur une laïcité pervertie :  » Ces débats sur la laïcité sont frappés de trois travers : une duplicité certaine, une confusion évidente et une ignorance manifeste, qui confine au mépris. Duplicité certaine, car chacun aura aisément constaté qu’au bout du compte, la laïcité est convoquée de manière parfaitement opportuniste dans le seul espoir de discréditer les propos religieux et de promouvoir les positions adverses. Ce n’est pas une question de laïcité, mais de divergence d’opinions. Car ce n’est pas tant le fait que le propos soit tenu par des religieux qui incommode les contradicteurs que le fait qu’il contredise leurs idées. Ce n’est ainsi pas un hasard si l’on n’a guère entendu les tenants de la laïcité sommer un homme tel que le père Riffard de confiner sa foi à l’intime, lui qui est poursuivi pour l’hébergement de demandeurs d’asile dans son église. Ce n’en est pas un non plus si l’on n’a jamais entendu quiconque intimer à Mère Teresa, à Sœur Emmanuelle, au Père Pedro ou à tous les religieux anonymes publiquement engagés chaque jour de par le monde auprès des plus fragiles, de « limiter la religion à l’espace familial et aux lieux de culte ». »
  4. Sur l’Islam, l’enfouissement de l’identité nationale et les échecs de l’intégration, manifestés « après Charlie » :  » Dans la précipitation d’un moment tragique, les analyses faciles sur lesquelles le pays se repose depuis tant d’années sont inévitablement ressorties : il faut faire corps autour de la liberté d’expression, autour de la liberté et rien de plus. Impossible d’apercevoir, derrière notre horizon bouché de libertés, la vérité et avec elle, la responsabilité. Et pourtant, seule la vérité, c’est-à-dire le sens en même temps que le bien, peut fournir une réponse au drame national que nous avons vécu… et à ceux qui se préparent. Nous devons apprendre à dépasser la liberté, d’expression ou de toute chose, qui n’est qu’un cadre, un cadre de vie et de surcroît un cadre acquis. Nous ne cessons d’invoquer la liberté, comme si véritablement elle était menacée. Cela nous donne le frisson des combats épiques. Mais ce faux combat élude l’enjeu fondamental : au-delà de la liberté, chercher la vérité, la consistance, le sens et le bien commun. »

Ceci n’est qu’un petit florilège, et l’on trouvera d’autres paroles fortes dans les chapitres sur la fin de vie, la sexualité, l’avortement etc. C’est brillant, profond, et cela touche souvent très juste. Merci, M. Le Morhedec : puisse ce livre se trouver au chevet de beaucoup.

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