Lors d’une conversation de table, un ami me disait : « notre gouvernement manque d’humanité ». Quelque chose de ce que l’on appelle l’empathie. Et je lui donne raison au regard du mouvement initial des Gilets jaunes, ou encore de ces quelques phrases à l’emporte pièce de notre président.
Avis corroboré par la rencontre récente d’un autre ami qui, par sa situation dans une grosse entreprise française, est souvent en contact avec les « élites administratives parisiennes », qu’elles soient situées à la mairie de Paris ou à l’Élysée, et qui me confiait : « Quelle arrogance ! ». Je veux bien le croire. En même temps, pour reprendre une formule à la mode, je suis loin de penser que le défaut d’humanité ne soit le fait que de ces « élites ».
Je le retrouve à bien d’autres étages dans notre société dite « développée ». Par exemple lorsque sont accordés des émoluments absolument indécents, qui se chiffrent en dizaines de millions d’euros annuels, à tel chef d’entreprise ou à tel sportif : quand tant et tant de nos concitoyens peinent à s’en sortir avec le SMIC, et parfois moins ! Je sais bien que certains de ces « nouveaux riches » veillent à redistribuer une partie de la fortune acquise, je m’en réjouis et je me suis exprimé sur ce sujet dans un billet tout récent : mais cela ne saurait justifier, plus en amont, les écarts de revenus que j’évoque !
Défaut d’humanité encore quand je constate qu’on refuse d’accueillir et laisse souvent mourir en Méditerranée des centaines de migrants : « ils n’auraient pas dû se lancer dans cette entreprise suicidaire ». On oublie trop facilement qu’ils ne sont pas tous des terroristes, très loin de là, mais bien des victimes climatiques, économiques ou politiques, contraintes de fuir au risque de leur vie la rapacité de quelques « élites locales » ou de grands trusts industriels hébergés chez nous.
Mais défaut d’humanité aussi dans cette Église catholique à laquelle j’appartiens, et qui héberge des brebis galeuses plus criminelles que des loups… Une Église qui s’est souvent déclarée pourtant « experte en humanité », oubliant que son expertise est moins celle de ses membres, fragiles et pécheurs, que celle de son fondateur, Jésus, tant par ses paroles que par sa vie.
Il est possible et facile de continuer…
Dès lors, à la question qui ne manque pas de se poser, comment faire face à un tel « défaut d’humanité à tous les étages », je ne vois pas d’autre réponse possible que celle-ci : venir à la rencontre de l’expert en humanité qu’est Jésus, s’attacher à ses pas, suivre ses enseignements. Parce qu’il est seul à nous restituer le vrai visage de l’homme, celui d’avant le péché.
« Voici l’homme ! » (Jn 19,5), aurait dit Pilate lors du procès de Jésus. Comme le grand-prêtre cette année-là (Jn 11,51), il n’a eu aucune conscience de la dimension absolument prophétique de son affirmation.