La finitude, condition humaine incontournable et salutaire

La pandémie de Covid-19 va-t-elle être stoppée ? On l’a cru fin juin, on en est moins sûr fin juillet. Et puis, ne va-t-elle pas laisser la place, à plus ou moins brève échéance, à une autre pandémie, fruit d’une mutation du virus ou de l’apparition d’un nouveau virus ? Je ne vais pas répondre à cette question qui me dépasse, mais simplement remarquer que, quelle que soit la réponse, il est sûr que notre condition humaine est confrontée en ce moment et plus que jamais à sa finitude, qu’elle ne cesse pourtant de vouloir se cacher alors qu’elle est constitutive de son être.

Chacun de nous sait bien pourtant qu’il ne maîtrise presque rien de sa condition personnelle : pas seulement les affects sanitaires, mais aussi, pour ne citer qu’elle, sa mort. En passant par sa fécondité, sa vie professionnelle, ses rencontres… Certes, nous disposons de moyens personnels (culture, apprentissages, finances…) et d’évolutions techniques qui vont nous permettre de modifier, voire d’améliorer notre condition, et celle de nos frères et sœurs en humanité : il faut s’en réjouir et y travailler de toutes nos forces, mais notre condition humaine restera fondamentalement ce qu’elle fut à son origine, finie, et donc limitée et fragile.

Et c’est cette finitude qu’il nous est si difficile d’accepter. Et qui explique que nous écartions de nos vues et de nos chemins tant et tant de nos semblables parce qu’ils nous mettent face à cette condition : malades et handicapés, personnes âgées, sans domicile fixe etc. La société de consommation le sait, et elle nous propose mille moyens, rien d’autre en fait que des dérivatifs, pour nous faire oublier cette condition Incontournable.

Pour le chrétien, attaché à la parole de Dieu dans la Bible, et surtout à la personne de Jésus, dont il sait qu’elle lui montre le chemin (« Je suis le chemin, la vérité, la vie », Jn 14,6), la reconnaissance de cette condition est au contraire salutaire. Elle manifeste que l’homme est une création inachevée, qu’il a besoin de Dieu et des autres créatures pour la mener à sa plénitude. Et voici que même la défaillance du péché, assumée dans la pénitence, devient pour ce chrétien une occasion de salut : « Heureuse faute qui nous a valu un tel Rédempteur » (chant de l’Exultet, au cours de la vigile pascale).

La retraite des Bien-Aimés

Saint Paul, qui souhaitait être débarrassé d’une « infirmité » dont nous ne connaissons pas la vraie nature, a reçu ce message du Seigneur, valable encore pour chacun de nous : « ma force se déploie dans la faiblesse » (2 Co 12,9). La dixième « retraite des Bien-Aimés de Dieu« , destinée aux porteurs de trisomie 21 et à leurs familles, et qui s’est tenue à la Sainte Baume du 11 au 16 juillet, l’a montré une fois de plus : la faiblesse, la fragilité, le handicap, la misère ne sont pas des tares contagieuses, qui justifieraient la mise à l’écart de ceux qui les portent, au contraire, il s’agit de ces lieux privilégiés où se rencontre la bienveillance divine.

Et bien qu’il s’agisse d’une réalité différente, c’est aussi le cas du péché, qui « nous colle à la peau » et qui concerne chacun de nous : être pécheur ne justifie aucune exclusion, aussi grand ce péché soit-il. Voilà pourquoi Jésus n’hésite pas à venir à la rencontre des pécheurs, quels qu’ils soient, en balayant les préjugés de son temps : « Le Fils de l’homme est venu, mangeant et buvant, et vous dites : Voilà un glouton et un ivrogne, un ami des publicains et des pécheurs ! » (Lc 7,34 // Mt 11,19).

Tous, à des degrés divers, et selon des modalités diverses, nous sommes des témoins de la condition humaine véritable, à savoir finie. Une condition imparfaite qui appelle l’accueil, la solidarité (les chrétiens parlent plutôt de communion), le partage, pour progresser, tous ensemble. Et l’aide du Seigneur n’est pas superflue à cet effet, comme le rappellent par exemple, et parmi beaucoup d’autres, deux textes de la Genèse : celui qui évoque les « tuniques de peau » offertes à Adam et Ève (Gn 3,21), ou celui qui mentionne le signe de Caïn (Gn 4,15).

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