Frères et sœurs, vous connaissez sans doute, pour l’avoir entendu ou employé, l’expression : « Tu seras mon Jean-Baptiste ». Mais qu’est-ce qu’implique « être Jean-Baptiste » ? S’agit-il d’être un ambassadeur de l’évangile ? Sans doute, et très nombreux sont donc les Jean-Baptiste réels ou potentiels sur notre terre, y compris parmi nous. Mais Jean-Baptiste se réduit-il à sa mission de héraut ?
Les évangélistes Marc et surtout Matthieu ont choisi de mettre l’accent sur son austérité. C’est ainsi que Matthieu dresse un portrait bien connu du Baptiste : « Jean avait son vêtement fait de poils de chameau et un pagne de peau autour de ses reins ; sa nourriture était de sauterelles et de miel sauvage ». Là, c’est sûr, les Jean-Baptiste vont maintenant se compter au mieux sur les doigts d’une main !
Mais pour les évangélistes, un autre facteur est à souligner qui se manifeste dans le comportement du Baptiste. Comment ne pas remarquer que Jean connaît un vif succès et que l’on se presse autour de lui pour se faire baptiser ? Il aurait donc pu, comme l’on dit aujourd’hui, « surfer » sur son succès, se faire une cour, créer un parti… Mais non, il choisit de diminuer pour que grandisse Jésus qui vient après lui, et dont il ne s’estime pas digne de délier la courroie de sandale. L’humilité constitue un trait caractéristique de Jean-Baptiste, au point de précéder Jésus dans son abaissement exemplaire, qu’il manifestera jusque dans la mort. Avec cela, les Jean-Baptiste vont sans doute se faire plus rares.
Jean-Baptiste serait-il donc un exemple inatteignable ? Non pas, si l’on s’intéresse au message. Me revient en mémoire l’admirable sermon 288 de saint Augustin, qui médite sur le fait que Jean-Baptiste est la voix, Jésus la parole. Soyez attentifs, comme disent les liturgies orientales, voici un extrait un peu long de ce sermon :
« Je sais ce que je veux dire, je le possède dans mon esprit, je cherche des termes pour l’exprimer ; avant que ces termes soient prononcés par ma voix, je possède assurément la parole, la pensée en moi-même. Ainsi la parole est en moi antérieure à la voix ; elle existe d’abord, la voix ne vient qu’ensuite. En toi au contraire, c’est l’oreille qui est frappée d’abord du son de ma voix pour porter ma pensée, ma parole à ton esprit. Comment connaîtrais-tu ce qui était en moi avant aucune émission de voix, si ma voix ne l’avait porté jusqu’à toi ? »
Frères et sœurs, parole et voix vont de pair. Si l’austérité de Jean-Baptiste et sa profonde humilité peuvent nous sembler difficilement imitables, le fait qu’il soit la voix parfaitement liée à la parole nous le rend plus accessible, car c’est une condition que nous pouvons remplir. Il nous faut juste, si je peux dire, accueillir et faire vivre la parole de Dieu, en la transmettant avec simplicité et humilité à notre entourage, selon nos possibilités. En route, frères et sœurs, ne demandons pas aux autres d’être des Jean-Baptiste, soyons-le pour eux.
Textes : Isaïe 61, 1-2a.10-11 et Jean 1, 6-8.19-28
Merci infiniment de ce texte qui ma parle !