Frères et sœurs, en rapportant la mort des saint Innocents, l’évangéliste Matthieu pensait très certainement à l’histoire parallèle de la mort des premiers-nés en Égypte lors de la naissance de Moïse. En Exode 12,29, on lit : « Au milieu de la nuit, le Seigneur frappa tous les premiers-nés dans le pays d’Égypte, aussi bien le premier-né de Pharaon qui devait s’asseoir sur son trône, que le premier-né du captif dans la prison et tous les premiers-nés du bétail ».
Mais il existe quelques différences, et pas des moindres. Si avec Moïse, les Hébreux ont été épargnés en quittant l’Égypte, Jésus est sauvé en y retournant avec ses parents. Quel retournement de situation qui manifeste que rien n’est jamais figé dans les modalités du salut divin.
Mais un autre élément surprend, voire choque. Si lors de la naissance de Jésus, c’est Hérode qui provoque le massacre, dans l’histoire de Moïse, l’auteur attribue le massacre à Dieu lui-même, comme une vengeance ! Horreur !
À moins de comprendre ce qui est véritablement en jeu dans l’un et l’autre récit. J’en avais déjà sur ce blog donné une interprétation, mais je voudrais en proposer aujourd’hui une autre lecture, qui n’infirme pas la précédente.
Reconnaissons d’abord qu’il est impossible de dire ce que furent exactement ces deux événements. Ce qui est certain en revanche, c’est qu’en les évoquant, les narrateurs recourent à un procédé littéraire connu à toute époque, dans lequel le héros échappe miraculeusement à la mort qui le guette. Cette singularité est le signe de la protection supérieure, voire divine, dont il bénéficie.
Une protection qui est symboliquement encore plus marquante dans le cas de Jésus. Pour le dire de manière un peu lapidaire, en échappant dès le début de sa vie à une mort humaine, Jésus annonce déjà la résurrection dont il bénéficiera à la fin de cette même vie. Lui et ceux qui le suivent, en l’occurrence ici Marie et Joseph.
En commentant ce récit de Matthieu, j’ai mis l’accent sur sa signification pour Jésus, mais laissé dans l’ombre les Innocents. Bien sûr, ils n’ont pas, comme Etienne que nous fêtions mardi, confessé explicitement la foi, mais ils restent pour moi les premiers martyrs car leur mort est en relation avec la venue de Jésus dans le monde. Et l’histoire leur a donné une nombreuse descendance !
Textes du 28 décembre : 1 Jean 1, 5 – 2, 2 ; Matthieu 2,13-18