Frères et sœurs, à ma grande surprise, ni à la messe de la veille, ni non plus à celle du jour, ne nous est proposé le texte de la Genèse rapportant la rencontre d’Adam et Eve avec le Tentateur : un récit qui a donné naissance à ce que l’on appelle le « péché originel ». Or, il me semble que l’on y trouve la clé du mystère de l’Assomption, et plus généralement du mystère de Marie.
Le récit, vous vous en souvenez sans doute, évoque la manière dont Adam et Eve se sont laissés tenter par le serpent et se sont éloignés de l’interdiction divine qui leur avait été signifiée : « vous ne mangerez pas de l’arbre qui est au milieu du jardin ». Voilà le point d’origine de la distance qui sépare désormais Dieu et les hommes, une distance irrémédiable qui touche tous les hommes de notre monde et que Dieu seul peut combler par sa grâce.
C’est ici qu’il faut parler de Marie. Celle-ci, par une grâce divine particulière issue par anticipation de la mort et de la résurrection de Jésus, n’a pas connu ce péché originel de la distance vis-à-vis de Dieu et de sa parole : son Fiat, « qu’il me soit fait selon ta parole », est éternel. L’Eglise catholique l’a reconnu et en a fait en 1854 un dogme connu sous le nom d’Immaculée Conception.
Mais, en bonne logique, l’Eglise ne s’est pas arrêtée là. Si Marie a été, à l’aube de sa vie terrestre, conçue sans péché, alors il est légitime de croire que le péché ne l’a pas retenue ni sur la terre ni dans quelque purgatoire au terme de sa vie terrestre : voilà ce que reconnaît et proclame l’Assomption, dont le pape Pie XII a fait un dogme en 1950. Je le cite : « Marie, ayant été préservée du péché originel et n’ayant commis aucun péché personnel, a été élevée à la gloire du ciel, dès la fin de sa vie terrestre, en corps et en âme ».
L’un et l’autre dogme sont donc liés à l’absence du péché originel et du péché personnel chez Marie, dont on dit avec raison qu’elle est « la nouvelle Eve », telle que Dieu l’avait initialement conçue. Vous comprenez pourquoi je vous disais regretter que la lecture du chapitre 3 de la Genèse ne nous ait pas été proposée.
Mais me direz-vous, si Marie est concernée par l’Assomption, en quoi le sommes-nous ? Je ne peux que vous renvoyer à l’un de ces tableaux dans lesquels le peintre nous montre Marie accueillant sous son manteau les disciples de Jésus : le peintre manifeste que si Marie fut la première à retourner au ciel pour reprendre la place qu’Eve avait perdue, elle n’est pas la seule. Elle a en quelque sorte rouvert les portes du paradis à tous les hommes, dont elle couvre le péché originel : « la première en chemin », comme dit un chant actuel, mais non pas la seule, bien au contraire. Par elle et avec elle, nous retrouvons le chemin du ciel, et c’est pourquoi il nous est si bon de nous tourner vers elle, de la prier, de nous unir à elle, spécialement en ce jour de l’Assomption.
Prédication donnée à l’église paroissiale de St Pierre Quiberon, le 15 août 2022 en la fête de l’Assomption. Sur le même thème plusieurs prédications figurent déjà sur ce blog, par exemple ici.