Saint Dominique, aperçu d’un saint méconnu

Connaissez-vous saint Dominique ? Pas sûr ! Les Dominicains, comme on les appelle aujourd’hui, peut-être : sous savez, ces religieux de blanc vêtus avec une chape noire, tels qu’on en voit dans certains films. Ils ont longtemps été nommés Jacobins, du fait de leur premier établissement rue saint Jacques après leur arrivée à Paris. Ils sont souvent détestés a priori pour le rôle qu’ils auraient joué dans une Inquisition largement « fictive ». En effet, les historiens contemporains se distancient clairement de la « légende noire de l’Inquisition« , telle qu’elle s’est développée en particulier au XIXe siècle (cf. par exemple ce lien)
Quoi qu’il en soit, le tribunal de l’Inquisition est né en 1231 dix ans après la mort de saint Dominique !

Saint Dominique
Saint Dominique

Le personnage de saint Dominique, que j’ai déjà évoqué sur ce blog, est donc le plus souvent méconnu. Faute de documents (Saint Dominique n’a laissé que deux lettres), faute aussi du faible élan de ses successeurs à faire connaître et promouvoir la vie de leur fondateur. Le document de base reste le « livret sur les origines de l’Ordre des Prêcheurs« , plus connu sous le nom de Libellus (livret), rédigé à l’initiative de son premier successeur, Jourdain de Saxe. A quoi on peut ajouter les Constitutions primitives, dans lesquelles les historiens reconnaissent « la patte » de Dominique.

Au-delà de la volonté hagiographique, on y découvre un castillan né en 1170 à Caleruega, dans une famille probablement noble, formé à l’étude ecclésiastique (et donc à la connaissance de l’Ecriture sainte), entré au chapitre de l’évêque d’Osma, Diègue, qui sera largement au départ son maître à penser. On estime en particulier aujourd’hui que c’est de lui qu’il tiendra son attachement à la pauvreté mendiante, qui deviendra sa norme à partir de 1207. Après avoir rencontré à Montpellier des légats, trop richement caparaçonnés pour battre en brèche l’exemplaire pauvreté de leurs adversaires hérétiques.

Mais Dominique est aussi un homme de grande bonté et générosité. Bonté qui s’exprimera, ce qui peut surprendre aujourd’hui, par une insistance sur l’étude et le débat (disputatio), comme lieux privilégiés de la manifestation de la Vérité qu’est Jésus (Veritas est ainsi une des devises de l’Ordre des Prêcheurs que Dominique fondera en 1216). Jourdain de Saxe rapporte que Dominique aurait passé une nuit à « réduire à la foi » un aubergiste égaré dans le catharisme, dans la région toulousaine. Et générosité, lorsqu’il n’hésitera pas le cas échéant à vendre ses précieux livres pour venir en aide à des victimes d’une famine.

En 1216 donc, après plusieurs années passées à Fanjeaux et Prouilhe, au sud de Toulouse, où il établit un lieu d’accueil pour des femmes repenties du catharisme, il crée à Toulouse l’Ordo Praedicatorum (Ordre des Prêcheurs, o.p., et non des frères prêcheurs !), dont le mission est d’annoncer et favoriser la diffusion de l’évangile, en venant en particulier en aide aux évêques dans leur rôle de prédication et d’enseignement. Saint Dominique, qui continue de voyager beaucoup et de susciter de nombreuses vocations, obtient la reconnaissance de son Ordre à Rome par le pape Innocent III. Il meurt d’épuisement en 1221 à Bologne, où son corps se trouve encore. La Saint Dominique est officiellement fêtée le 8 août, en plein été et donc souvent déplacée au 24 mai, jour de la Translation de ses restes à Bologne.

Destiné d’abord à des frères, largement recrutés dans cette Université nouvelle qui connaît un développement rapide, l’Ordre n’en accueille pas moins, avant les frères d’ailleurs mais sans que l’Ordre soit encore fondé, des sœurs cloîtrées ou moniales, dites contemplatives, dont le monastère de Prouilhe est le modèle. Puis des laïcs, officiellement à partir de 1285 ; plus tard encore des sœurs dites « actives », à l’origine de nombreuses créations ou gestions d’hôpitaux et d’écoles ; enfin des instituts et des prêtres séculiers. On parle alors de Tiers Ordre séculier, de fraternités laïques ou sacerdotales. L’ensemble forme ce que l’on a coutume d’appeler la « famille dominicaine », très vaste (peut-être 150.000 membres) et largement répandue dans le monde.

Gerard Timoner III

L’Ordre, qui a fêté récemment son 800e anniversaire, est conduit par un Maître, selon l’appellation que l’on donnait à saint Dominique lui-même. Il s’agit actuellement d’un Philippin, Gerard Timoner III, 88e successeur de saint Dominique. Celui-ci vit au couvent de Sainte Sabine à Rome, entouré d’une « curie », mais se déplace beaucoup dans le monde : nous venons de l’accueillir pour 48h à Montpellier (24-25 mars 2023).

Pour en savoir plus, les Toulousains iront visiter la maison Seilhan, place du Parlement, dans laquelle se trouve la représentation proposée en page d’accueil, œuvre de Verotius : « Résurrection du fils d’une veuve » (1754).

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