Prédication donnée chez les moniales dominicaines de Dax le dimanche 23 avril 2023. Textes : Ac 2, 14.22b-33 ; Lc 24, 13-35
Mes sœurs, chers amis, sans doute ne suis-je pas le seul pour qui cette cécité des disciples de Jésus a quelque chose de surprenant : aujourd’hui, Cléophas et son compagnon ne reconnaissent pas Jésus alors qu’il fait route avec eux, hier Marie-Madeleine prend Jésus pour le jardinier.
Bien sûr, cette cécité consonne avec ce que nous constatons sans cesse autour de nous, où Jésus est le grand méconnu, et souvent le grand absent. D’ailleurs, cette cécité, n’est pas humainement si étonnante et peut trouver une explication : ne vous est-il pas arrivé d’apprendre que vous avez croisé une bonne connaissance, au point presque de lui marcher sur le pied, sans la reconnaître ? Parce que vous étiez perdus dans vos pensées, parce que vous aviez les yeux collés sur votre smartphone, parce que la rencontre était inattendue dans ce lieu ci ou à ce moment-là…
On dit souvent que « qui cherche trouve », et cela nous est dit déjà dans l’évangile de Luc. Mais ceux que l’on appelle justement des chercheurs vous diront qu’ils ne trouvent qu’à condition d’avoir une idée, même floue, de ce qu’ils cherchent : les disciples eux, malgré les annonces faites par Jésus, pâtissent du fait que la résurrection n’était encore qu’une idée très lointaine et pas une réalité.
Et c’est donc à chaque fois Jésus qui fait le pas de la reconnaissance pour permettre aux disciples de passer de la cécité à la lumière. Il le fait, en donnant des signes, aujourd’hui comme hier. Hier, c’était la relecture de la sainte Ecriture et la fraction du pain pour les disciples d’Emmaüs, la voix particulière du Maître pour Marie-Madeleine, le toucher pour Thomas. Aujourd’hui, ce peut être l’eucharistie ou l’écoute de l’évangile pour certains, un chant ou telle lecture spirituelle pour d’autres, une parole de réconfort ou une guérison pour d’autres encore.
A la lumière de cette reconnaissance, « tout est pareil et tout est différent », comme le disent volontiers les convertis, et comme pourraient en témoigner les disciples d’Emmaüs. Ceux-ci viennent de confier à Jésus avoir espéré la délivrance d’Israël, sans doute au plan politique, avant de le rencontrer ; après l’avoir rencontré, rien autour d’eux n’a changé, mais ils savent que cette délivrance se situe sur un tout autre plan, à partir duquel ils vont pouvoir relire leur vie et celle du monde.
Ils sont ainsi passés de la cécité à la lumière. Frères et sœurs, quels que soient les signes qui nous sont donnés, puissions-nous lire ces signes, y reconnaître la présence de Jésus et faire le même passage.