
Sous ce titre surprenant et provocateur, invitant habituellement à trouver dans les femmes les responsables d’une situation dommageable, Céline Guillaume propose aux femmes de retrouver leur âme. Autrement dit, de chercher et de se retrouver pleinement dans leur être de femme, au-delà de toutes les apparences dont notre monde (occidental) veut les parer. On pourra lire en complément et dans un tout autre genre l’étude d’Hélène de Saint-Aubert sur Genèse 2, que j’ai présentée sur ce blog.
La réflexion se développe en trois étapes : être femme, mon âme ce paradis perdu, ensemble c’est tout. La première partie est fondamentale, elle pose les bases d’un féminisme bien différent de celui qui nous est proposé aujourd’hui dans les revues, romans ou autres écrits et vidéos. Ne serait-ce que parce que l’autrice (je reprends le mot à la 4e de couverture) reconnaît l’existence d’une nature humaine (cf. p. 14 ou p. 42), créatrice d’un genre que la seule volonté ne suffit pas à définir (p. 20).
Pour justifier son propos, l’autrice pose une question qui me semble pleine de bon sens ; « A quoi peut se rattacher une fraternisation si elle n’est pas liée à une filiation ? » (p. 31). Elle peut alors évoquer la présence d’un Dieu créateur dans une « sortie » que j’aime beaucoup : « Nous avons omis Dieu, rêvant de devenir plus puissant que lui. S’il existe, qu’il reste dans son ciel bien lointain. Nous ne lui devons rien et n’avons aucun compte à lui rendre. Et quand nous le convoquons, c’est pour lui imputer les catastrophes humaines dont est responsable notre seule folie prométhéenne. » (p. 38). Je constate que de telles critiques rejoignent plusieurs de celles que j’ai développées dans des billets publiés sur mon blog Proveritate !
La deuxième partie, originale, propose une invitation à un retour vers le concept d’âme. Et pour cause : « Mon organe manquant, c’est mon âme. Ma fonction compromise, c’est celle de ma vie intérieure. » (p. 79). Là encore, et non sans justesse, les critiques de la situation actuelle pleuvent. Je relève celle-ci : « Nous sommes ultra-connectées à l’extérieur, mais hyper-déconnectées à l’intérieur » (p. 78).
Le défaut d’âme risque de conduire à l’exercice d’une pseudo-liberté : « N’est-il pas vertigineux de réaliser combien nous sommes libres ? Tellement vertigineux que nous préférons souvent laisser les autres ou les événements décider à notre place. Le plus grand risque que Dieu prend en nous créant, c’est celui de notre liberté » (p. 85).
Je ne vais pas m’étendre sur la troisième partie, qui se présente comme une belle « apologie de la femme », en particulier dans son rapport à l’homme. On y trouvera maintes affirmations suggestives, mais qui ne manqueront pas d’être discutées par les hommes. En voici une à titre d’exemple : « Les femmes aident les autres à se révéler à eux-mêmes. Elles les font naître au monde. Elles sont des maïeuticiennes des âmes » (p. 168). A plusieurs reprises, j’ai cru entendre le propos du pape Jean-Paul II qualifiant les femmes de « sentinelles de l’invisible« .
Le livre se lit facilement même si, au-delà des trois grands chapitres, j’ai eu parfois du mal à suivre la progression de l’argumentation au fil des différentes parties. Sans doute faut-il incriminer le caractère passionné (cf. 4e de couverture) de l’autrice sur un sujet fondamental et délicat, qui luit tient à cœur.
Libraire, présidente du groupe La Procure, laïque dominicaine, Céline Guillaume est l’autrice, aux Éditions du Cerf, de l’essai remarqué Dieu est passé par là.
Chercher la femme, Paris, Cerf, 19 €.