Quelques notes sur « le Fils prodigue » de Rembrandt

Avertissement : ces notes sont largement, mais pas totalement, inspirées dune conférence donnée à Montpellier le 27/03/25 par le père Bruno Régent. Sur le thème du « fils prodigue » ou plutôt « fils cadet ».

S’il est un tableau très connu de Rembrandt, c’est certainement celui du « Fils prodigue » (que je dirai surtout « cadet » tant le père est aussi prodigue que son fils) qui propose une illustration du fameux évangile de Luc 15,11-32. Mais une recherche en ligne sur ce tableau n’en montre le plus souvent qu’une partie, celle de gauche, qui représente le fils cadet de dos, agenouillé devant son père. Et plusieurs éléments clés du tableau, importants pour son interprétation, s’en trouvent évacués. Voici le tableau dans son format complet, mais sur lequel, à la suite du père Régent, j’ai ajouté deux lignes :

Le fils cadet de Luc 15

Dans un premier temps, il importe de recenser les personnages présents, autant du moins qu’on puisse le faire sans se tromper :

  • Au centre quatre personnages, les protagonistes : de gauche à droite, le fils cadet agenouillé, son père, le fils aîné assis, et un membre de la classe sacerdotale.
  • Au milieu, séparant ces quatre personnages, une figure neutre, qui pourrait être n’importe lequel de ceux qui regardent la scène, chacun de nous en quelque sorte.
  • Enfin, en haut sur la gauche, très estompé, un visage de femme avec la coiffe de l’époque. Je ne sais qui elle peut représenter. Faut-il penser à Marie, mais je ne vois pas sur quelles bases.

Quelles sont ensuite les différentes caractéristiques des attitudes de chacun des personnages ?

  • Les lignes parallèles indiquent que le regard du « prêtre » se dirige vers le père, et celui du fils ainé vers son frère. Ces deux regards semblent vouloir jauger, sinon condamner les personnages visés, le père et le fils prodigue.
  • D’ailleurs, ils ont les mains fermées, et sont « droits dans leurs bottes », assis ou debout. Le bâton du « prêtre », planté droit en terre, en rajoute à cet aspect hiératique.
  • A l’inverse, le père et son fils cadet sont courbés, en mouvement. Ils sont la vie ! Et les lignes qui les rejoignent partent du haut vers le bas, comme pour signaler leur humilité.
  • Le fils cadet n’a gardé qu’une sandale au pied. Ce thème de la sandale a plusieurs antécédents bibliques, en particulier l’apparition à Moïse au cœur d’un buisson brûlant : là, Moïse est invité à retirer ses sandales parce qu’il se trouve « sur une terre sainte ». Le fils cadet se trouverait-il en face de son Père dans une situation identique ?
  • J’ajoute une remarque très personnelle. Les deux personnages de droite sont coiffés d’un chapeau, ceux de gauche sont têtes nues. Quand on sait comment les chapeaux peuvent marquer une dignité, tels les chapeaux des maîtres en théologie à l’époque médiévale ou aujourd’hui, sous influence étasunienne, les toques des étudiants recevant leurs diplômes, il ne me semble pas impossible que ce « tête nue » soit aussi une marque d’humilité.

Voilà ce qu’une lecture de ce célèbre tableau suggère, et ajoute sans doute au texte biblique, tout en restant en phase avec lui. L’examen peut sans doute être poussé plus loin, mais je laisse le lecteur de ce billet le faire.

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